Colorado Trail/Continental Divide Trail : 900km à pied dans le Colorado

par Julien DEFOIS
Colorado Trail/Continental Divide Trail : 900km à pieds dans le Colorado

Julien DEFOIS nous partage son trek de 26 jours sur les principaux sentiers de grandes randonnées Colorado Trail et Continental Divide Trail dans les Rocheuses du Colorado.

La lumière magique du soleil couchant lors du trek sur le Colorado trail
La lumière magique du soleil couchant
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2 Récit de la traversée du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Informations pratiques sur le Colorado Trail et Continental Divide Trail

Dates de mon expérience sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail :

Du 22 juillet au 16 août 2018

Lieu du Colorado Trail et du Continental Divide Trail :

USA, Etat du Colorado, sentiers Colorado Trail (Denver-Durango) et Continental Divide Trail (Mexique-Canada par la ligne de partage des eaux), de South Platte Trailhead à Cumbres Pass.

Comment se rendre au Colorado Trail et au Continental Divide Trail :

Avion depuis Toulouse jusqu’à San Francisco, puis encore un vol jusqu’à Denver : 620€ A/R jusqu’à San Francisco plus 100€ pour Denver. Il est possible d’aller directement à Denver depuis l’Europe avec certaines compagnies.

Pour se rendre au départ, il faut soit faire appel à des trail angels (voir section sur les liens internet) soit commander un taxi. Depuis Cumbres Pass, j’ai fait du stop jusqu’à Alamosa où j’ai pris un avion jusqu’à Denver avec Boutique Air dont les tarifs peuvent concurrencer ceux du bus. Il y a bien un bus pour Denver, mais personne n’a été capable de me donner des informations précises à ce sujet.

Participant :

Julien, 38 ans au début de la marche, 39 à la fin. Grand amateur de randonnée itinérante. Skieur de randonnée l’hiver, à pied l’été. C’est mon 3ème séjour aux Etats-Unis.

Julien DEFOIS est aussi l’auteur de:

Où dormir durant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail :

Principalement, dans votre tente ! Aucun refuge ni abri sur l’itinéraire, mis à part une yourte au mile 367 (direction sud) du Colorado Trail, que l’on peut réserver.

Les villes où l’on peut dormir dans un hôtel ou un gîte sont assez nombreuses, listées dans la section ravitaillement et un peu plus loin.

Où se restaurer/où se réapprovisionner sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail :

Deux stratégies de ravitaillement. Il est possible d’envoyer un colis de ravitaillement à chaque hébergement où l’on compte faire étape ou bien on peut se ravitailler en ville directement. On économise alors le coût du colis et on peut adapter la nourriture à ses envies, mais c’est plus cher sur place et le choix peut être moindre. J’ai opté pour le colis envoyé en avance, sans regret pour la plupart des cas. Les « hiker boxes », ces cartons où les randonneurs déposent les excédents de ravitaillement, peuvent compléter vos provisions, et parfois bien alléger vos courses en ville.

Voici les lieux où je me suis effectivement ravitaillé sur le Colorado Trail :

Mile 104 :

Breckenridge. Bus gratuit depuis le sentier. Il est également possible d’aller à Frisco ou Silverthorne depuis ce même arrêt de bus. Breckenridge est une station de ski animée été comme hiver. Supermarchés, poste, hôtels et 2 gîtes, le Bivvi où j’ai dormi et que je recommande ou The Fireside Inn.

Mile 177 :

Twin Lakes. Je n’y ai pas dormi. J’ai envoyé mon colis au General Store, petite épicerie où vous trouverez le nécessaire pour un ravitaillement. Des food trucks et des restaurants vous attendent pour changer de vos rations de randos. Il y a des hébergements sur place, mais je ne les ai pas pratiqués. Twin Lakes se trouve directement sur le sentier.

Miles 254 :

Monarch Crest Store. Situé directement sur le chemin, sur la variante Collegiate West du Colorado Trail, le magasin de Monarch Pass garde les colis qu’on lui adresse gratuitement. Stand de restauration rapide, quelques snacks, beaucoup de souvenirs à acheter. Pas d’hébergement, pour cela il faut descendre à Salida en stop (stop très facile sur ce secteur), ce que nous avons fait. A salida, nous avons dormi au Simple Lodge, l’hébergement le plus prisé des randonneurs, très bien adapté à leurs besoins. Nombreux restaurants et supermarchés, dont un walmart et un safeway. Vous n’avez donc pas besoin d’envoyer de colis si vous prévoyez de dormir à Salida.

Miles 357 :

Lake City. Charmant village construit à l’époque de la conquête de l’ouest, dont de nombreuses maisons datant du siècle dernier sont encore habitées. Vous pouvez dormir dans des Cabins, aux tarifs intéressants si vous êtes plusieurs ou si vous voulez être tranquilles ou bien comme nous au Raven’s rest Hostel, le repaire des randonneurs dans le village. Deux épiceries vous fourniront tout ce dont vous avez besoin et faites un tour à la boulangerie, qui propose de bons gâteaux et des encas salés qui valent le détour.

Mile 409 :

Silverton, que l’on rejoint facilement en stop depuis Molas Pass. Encore un village historique, marqué par les mines. L’ambiance far west est très prégnante. Seule la rue principale est bitumée. Un train touristique à vapeur fonctionne toujours. Pour dormir, des motels et un gîte, le Blairstreet Hostel qui propose les meilleurs tarifs. Une seule épicerie, qui n’est pas bon marché. Les restaurants sont nombreux, je recommande Avalanche Brewing Company, pour ses bonnes pizzas et ses bières maison. Vous pouvez aussi dormir au Molas Lake Campground si vous ne voulez pas aller à Silverton. Sachez quand même que les tarifs d’une nuit au camping sont les mêmes que ceux d’une nuit en dortoir au gîte. Le petit lac de Molas (au dessus du grand où se situe le camping) est entouré par un « primitive campground », un camping gratuit mais sans infrastructure à part des toilettes sèches.

Pour les autres possibilités de ravitaillement et de retour en ville, allez dans la section sur les liens internet et cliquez sur celui de pmags.

Ravitaillement à Wolf Creek Pass

Sur le Continental Divide Trail, je ne me suis ravitaillé qu’à une seule reprise, depuis Wolf Creek Pass. Entre Silverton et Cumbres Pass, vous n’avez que Wolf Creek pour recharger vos provisions. De là, vous avez 2 alternatives en stop facile :

  • Vers le sud, Pagosa Springs (je n’y suis pas allé) : village animé et touristique, hébergements assez chers (comptez 70€ au moins), épicerie.
  • Vers le nord, South Fork (où j’ai fait étape) : nuit au Spruce Lodge qui semble un peu luxueux avec ses chambres pourvues de 2 lits king size, après 3 semaines sous la tente ou en dortoir. Comptez 60€ la nuit quand même. Moins cher, le camping du village accueillera les inconditionnels de la tente. Le village compte 2 supermarchés aux tarifs abordables et bien fournis : Dollar General, discount, et Rainbow Express, plus de choix. Les restaurants ne manquent pas. Pour circuler, vous pouvez emprunter des vélos mis à disposition des randonneurs du Continental Divide. Voyez avec votre hébergement, ils sauront vous indiquer comment faire.

J’ai également fait étape à Alamosa, situé à 1h30 de Cumbres Pass, à la fin du trek. Les hébergements sont chers, comptez 70€ minimum. J’ai préféré faire du porte à porte et trouver un jardin chez un particulier pour planter ma tente. Alamosa compte de nombreux restaurants, des supermarchés, tout ce qu’il vous faudra.

Office du tourisme :

Tous les villages traversés disposaient d’un Visitor Center, en général assez accueillant. Je n’en ai pas eu besoin pour l’organisation de mon voyage.

Caractéristiques des sentiers Colorado Trail et Continental Divide Trail :

J’ai parcouru des tronçons de 2 sentiers : le Colorado Trail (CT) et le Continental Divide Trail (CDT). Aucun de ces sentiers n’est équipé de refuge. Il faut le faire en autonomie complète avec des ravitaillements ponctuels en ville.

Carte du CT

Le Colorado Trail part de la banlieue de Denver et parcourt les Rocheuses jusqu’à Durango sur 485 miles. En général, on fait la traversée du nord vers le sud, ce qui permet de garder les plus beaux secteurs pour la fin. Il est très bien maintenu et très bien balisé, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une carte papier. Il est assez forestier jusqu’à ce qu’il rejoigne le CDT à Georgia Pass. Ensuite, il sera beaucoup plus en altitude et au dessus des forêts. La plupart du temps, on évolue au-dessus de 3000m.

Le chemin passe de nombreux cols, évolue parfois en crête mais évite en général les plus hauts sommets. Le CT est fréquenté en été, mais rien à voir avec ce que j’ai pu expérimenter en Californie dans la Sierra Nevada. Vous trouverez juste assez de monde pour ne pas vous sentir seul, et parfois vous ne verrez personne. La période pour le réaliser court de juin à septembre : comptez entre 3 et 6 semaines selon votre rythme pour aller de bout en bout. Aucun permis n’est requis, vous n’aurez qu’à vous enregistrer à l’entrée de certaines wilderness (réserves naturelles).

Tracé de l'itinéraire du CDT
Tracé de l’itinéraire du Continental Divide Trail

Le Colorado Trail du Mexique au Canada

Le CDT s’étend sur 3100 miles du Mexique au Canada. Il faut entre 4 et 6 mois pour le faire en entier, alors on peut en faire juste une partie comme moi. C’est un sentier difficile, pas forcément bien marqué, pour lequel un gps s’avère indispensable. Il n’est pas très fréquenté et seulement quelques dizaines de randonneurs en viennent à bout chaque année. On peut le faire dans les 2 sens, même si l’essentiel des randonneurs vont du sud vers le nord. Il s’attache à rester aussi près que possible de la ligne de partage des eaux, mais ce n’est pas pour autant un sentier de crêtes.

Parfois, il traverse des étendues très plates comme au sud du Wyoming. J’ai choisi de faire la section qu’il partage avec le CT et ensuite de poursuivre vers le sud à travers deux wilderness, Weminuche et South San Juans, parce qu’il me semblait que ces espaces étaient les plus sauvages et les plus beaux.

Réglementation du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Après coup, je crois tout le CDT est très sauvage, c’est l’essence même de ce sentier. Des permis sont requis pour les 3 parcs nationaux traversés : Rocky Mountains, Yellowstone et Glacier. Il n’y a pas de permis pour l’ensemble du sentier, il faut voir au coup par coup avec chaque parc.

Concernant le Colorado, il faut savoir que la météo estivale est très instable. C’est que les locaux appellent la mousson. Juillet et août sont les mois les plus pluvieux. En général, le temps tourne à l’orage dès le début d’après-midi. Pour autant, les épisodes orageux sont très mobiles et restent rarement bloqués au même endroit. Il faut compter sur la grêle, qui peut être localement très forte. Un paramètre à ne pas prendre à la légère pour l’organisation de son trek. Juin et septembre bénéficient d’un temps plus sec et ensoleillé.

Quoi d’autre dans les environs

Au nord de Denver, le parc national de Rocky Mountains abrite l’essentiel des glaciers du Colorado. Une destination prisée l’hiver par les alpinistes pour pratiquer l’escalade sur glace au Colorado.

Le massif des San Juans vaut à lui seul un séjour, notamment pour les secteurs entre Silverton et Lake City. Uncompahgre Wilderness abrite les plus hauts sommets du massif et sans doute les plus impressionnants aussi. Cette réserve ne se situe pas sur le chemin, un véhicule est nécessaire pour s’y rendre. Le massif des San Juans foisonnent d’itinéraires de randonnée.

A proximité d’Alamosa, vous pouvez visiter Great Sand Dunes National Park, où se trouvent les plus hautes dunes de sable d’Amérique du nord.

Retrouvez plus de parcs nationaux américains dans cet article :

Bibliographie

Le Colorado Trail Foundation édite des guides pour le CT : le guidebook et le databook. Le plus léger est le databook : chaque double page affiche une carte de la section ainsi que les points remarquables : eau, intersection, campement, routes, trailhead, etc. A commander en ligne.

Liens Internet

Facebook héberge des groupes dédiés aux 2 itinéraires que j’ai empruntés. On y trouve beaucoup d’informations et on peut poser des questions aux autres membres pour avoir des informations manquantes. C’est aussi le meilleur endroit pour déposer des annonces et contacter des trails angels, ces bénévoles qui aident les randonneurs.

  • CT 2018
  • CDT 2018
  • Le groupe Facebook Continental Divide Trail
  • Le site internet de la Colorado Trail Foundation fournit également de nombreuses informations pour l’organisation de la randonnée.
  • Un autre site très utile pour la préparation du CT (avec notamment la liste et le point kilométrique de chaque ville où il est possible se ravitailler) est celui de Pmags.
  • Concernant le CDT, le site de la Continental Divide Trail Coalition propose un guide de 100 pages à télécharger, une cartographie assez complète ainsi que de nombreuses informations
Un beau trek dans le colorado en perspective
Un beau trek dans le colorado en perspective

Récit de la traversée du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Je n’en suis pas à mon coup d’essai dans la rando longue distance aux Etats-Unis. L’an dernier, je m’étais lancé sur le Pacific Crest Trail et j’avais parcouru 750km. De retour, je continuais d’être appelé par les grands espaces américains. J’avais aussi tiré des leçons en termes d’organisation et d’allègement du sac à dos, des leçons que je souhaitais mettre en pratique. J’avais entendu parler du Continental Divide Trail comme d’un grand frère du PCT : plus long, plus dur, plus isolé.

Un coup d’œil aux cartes : beaucoup moins forestier aussi. Je recherche les sections les plus montagneuses : le Colorado, que je ne connais pas, s’impose. Le CDT recoupe pendant quelques centaines de miles le Colorado Trail, qui draine de nombreux randonneurs l’été. Le CT part près de Denver. J’ai mon départ : le début du CT. Il me faut un point d’arrivée. Une frontière me semble un bon moyen de terminer une marche si longue. Celle du Nouveau Mexique semble à portée de chaussure de rando : j’irai donc jusqu’à Cumbres Pass, à quelques kilomètres de la frontière.

Balisage du CT et du CDT
Balisage Continental Trail et Continental Divide Trail

7h du matin, South Platte River Trailhead, Colorado Trail segment 2. J’y suis. L’aventure va commencer. Des mois que je me prépare, que je rêve, que je lis les posts sur le groupe facebook, que j’ai commencé devant mon ordinateur ce voyage. Ni excité, ni inquiet. Parfaitement à ma place dans ce que j’entreprends et je suis serein. Je le serais sans doute un peu moins si devais me lancer seul et n’avoir que moi-même comme soutien, comme interlocuteur. Sans doute quelques restes de cette lointaine époque où l’enfant que j’étais aimais qu’on lui tienne la main jusqu’au bout le jour de la rentrée.

Partir seul…

J’ai choisi de partir seul, mais nous sommes finalement 4 à nous lancer sur le sentier. J’aurais sans doute pu m’entourer d’amis pour éviter ce saut dans le vide qu’est un grand voyage à l’étranger en solo. Mais je voulais aussi vivre cette expérience encore une fois, apprendre à marcher dans le vide comme un funambule, à être connecté au tout quand je lâchai l’essentiel de ma vie matérielle et affective, à trouver dans ce vide un sol sur lequel marcher. Mon voyage n’était pas qu’un chemin à parcourir dans les montagnes du Colorado : il était aussi une aventure intérieure dans les méandres parfois inexplorés et encore invaincus de mon être profond.

… ou pas !

Le destin en a décidé autrement. Quelques jours avant le départ, une allemande installée à Salt Lake me contacte. Elle a vu sur le groupe facebook du CT que je partais en même temps qu’elle. Caroline est une fille expérimentée sur les sentiers (elle a fait le Pacific Crest Trail) et  elle compte avaler les miles encore plus vite que moi. Nous décidons de partir ensemble, la solitude attendra que je sois disponible. C’est étonnant ce que la simple idée de partir à 2 peut être offensante pour cette solitude, qui préfère claquer la porte, vexée de n’avoir plus cette exclusivité.

Et puis il y aussi Rebecca, mon hôte AirBnb, qui a décidé de nous conduire au départ : devant tant de gentillesse et de sollicitude (je vous passe les détails), mon cœur part rempli de bienveillance. Elle nous accompagnera les premiers kilomètres avant de rentrer chez elle. Un gars s’apprête à se lancer alors que nous partons. Alex, de Salt Lake aussi. Il en est à son deuxième jour. Contrairement à lui, nous avons préféré sécher les 16 premiers miles sans grand intérêt, pour avoir plus de temps à consacrer au reste. Alex et Caroline sympathisent très vite et nous voilà donc partis à 4 sous les premiers rayons du soleil. Bientôt, nous saluons Rebecca et nous voici à 3, embarqués par hasard dans la même poussière.

Au départ du Colorado Trail
Caroline, Alex et moi (à gauche) au départ du trek

Trouver le rythme, lors du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Section aride sur le sentier du Colorado Trail
Section aride

Le Colorado Trail est divisé en 28 segments, qui vont de trailhead en trailhead (un trailhead c’est un point de départ de sentier). Le segment 2 est particulièrement sec. Aussi, lorsque nous arrivons à une caserne de pompiers située au bord d’une route, nous espérons certes qu’une pizza bien chaude servie par les pompiers nous attende, mais nous profitons surtout  (et seulement) du robinet en accès libre pour remplir nous bouteilles. L’eau, cet opium du randonneur. Des américains ont eu la gentillesse de monter là pour offrir aux randonneurs du CT des boissons et des chips. J’avale ma première bière du séjour, il est 10h du matin. Revoici les trails magics, une coutume très américaine qui veut que l’on aide les randonneurs en leur montant des boissons ou à manger.

Sur les plateaux de la section 2 lors du trek sur le CT
Sur les plateaux de la section 2, partie sèche

Dans cette section forestière aux intérêts paysagers limités, nous enchainons les miles : 26 au total aujourd’hui. Le lendemain, nous prévoyons de remettre ça. Pour y arriver, il faudra affronter quelques montées à plus de 3000m (des broutilles), mais surtout un réveil à 5h30. S’arracher au monde des rêves si tôt est particulièrement nocif à ma joie de vivre matinale, surtout en vacances. Le Colorado impose ses heures : plus tard, c’est prendre le risque de se faire « moussonner ». Autant rester sec. J’avale les miles presque aussi vite que ma bière hier.

Doutes pendant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail…

Montée vers le premier col au-dessus de 3000m, les orages pointent à l’horizon sur le Colorado Trail
Montée vers le premier col au-dessus de 3000m, les orages pointent à l’horizon

Avant la dernière montée de ce deuxième jour, je sens une inflammation dans les adducteurs. Elle trainait depuis un moment avant mon départ et les médecins que j’avais rencontrés n’avaient rien pu faire. Je savais que je prenais un risque en me lançant dans ce parcours de plus de 900km avec un corps qui n’était pas au mieux. J’étais parti avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, et voilà qu’elle me tombe dessus. Lever la cuisse m’est pénible, je ne boîte pas encore mais si ça continue je vais prendre feu dans les jambes. Je masse, la douleur s’apaise mais reste en embuscade. La journée s’achève, la grêle n’a rien pu faire pour calmer l’inflammation, même si elle a vraiment tout tenté cette après-midi.

Quand ça va bientôt nous tomber dessus sur le Colorado Trail
Quand ça va bientôt nous tomber dessus

C’est la nuit. Dans mon duvet je passe en revue tous les plans possibles. L’abondant me guette, l’inflammation est déjà là, je ne vais pas la calmer en enchaînant les journées de randonnée en itinérance et en autonomie. Je me demande ce que je pourrais bien faire en attendant mon vol de retour, sans provoquer une évaporation dramatique sur mon compte en banque. Aucune solution trouvée. Continuer. Je ne vois aucune autre chose à faire. Même si je dois marcher 10 miles par jour, je continuerai. J’ai du temps, je vais profiter de sa générosité. Je finis par dormir.

Départ à l’aube sur le Colorado Trail
Départ à l’aube

…Et soulagement

Le lendemain, la douleur est présente dès le départ. Elle reste dans des proportions acceptables, je peux lever la jambe sans souffrir. Et puis, elle commence à partir. Mile après mile, elle m’abandonne. Dans les jours qui suivront, elle finira par s’estomper. Soulagement. Même le réveil à 5h30 me semble acceptable si mes cuisses acceptent de me porter.

Les hautes plaines du Colorado
Panorama des hautes plaines du Colorado

Breckenridge

Ceux qui se trouvaient là ont eu moins de chance que nous avec la grêle
Ceux qui se trouvaient là ont eu moins de chance que nous avec la grêle

Nous franchissons le premier haut col, Georgia Pass, à 3500m quand même. Je ne sens plus mes cuisses, et l’altitude non plus. Sans doute les dividendes de mes nombreuses actions à plus de 3000m tout au long de l’année dans les Pyrénées.

Caroline monte vers Georgia Pass lors du Colorado Trail
Caroline monte vers Georgia Pass

Citation de mon journal avant d’arriver à cette station de ski, premier ravitaillement: « On se lève vers 5h 5h30 pour pas prendre la foudre. Qui a dit que c’était des vacances??Je me sens à ma place sur ce chemin, j’aime l’idée qu’il me reste encore des centaines de kilomètres à marcher. La nature nourrit l’âme et impose le repos à l’esprit. Même si je me lève à 5h du mat, c’est vraiment ça les vacances. Surtout qu’aujourd’hui on rajoute bière frites pizzas burger et douche chaude pour bien se ressourcer. »

Georgia Pass est vraiment très plat et très large
Georgia Pass est vraiment très plat et très large

Indigestion durant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

En quittant Breckenridge, je suis envahi d’un profond malaise. La journée en ville ne m’avait pas réussi. Plongée dans la société de consommation qui me prenait à contre-pied après quelques jours dans la nature sauvage: je supportais mal ce bruit, cette agitation, cette bouffe omniprésente, cette invitation perpétuelle à dépenser tout son argent, cet endroit où la conscience n’avait pas vraiment droit de cité. J’avais eu bière frites burger pizza et douche chaude mais je me rendais compte que ces plaisirs éphémères n’avaient en rien nourri l’essentiel.

Restaurant à Breckenridge sur le Colorado Trail
Restaurant à Breckenridge

Je me sentais complètement vide à l’intérieur, désorienté, ne sachant même plus ce que je faisais là, cherchant une branche à laquelle me raccrocher. Je sentais mon coeur fermé, la joie éteinte, une pressante envie de fuite, désespérée car il n’y avait nulle part où aller dans ce monde devenu étranger.

Nulle part où aller sauf sur le chemin, échappatoire évident et obligatoire. Il restait encore une étincelle en moi pour aller voir par-delà les montagnes si la vue était belle et si mon coeur voulait bien s’unir à la lumière de l’instant.

À mesure que je fuyais la ville, progressant dans la station de ski, mon inquiétude grandissait: le malaise ne se dissipait pas. J’étais traversé par de multiples questionnements: que faire si j’arrêtais ? Devais-je arrêter d’ailleurs? Que pouvais-je faire pour remédier à ça? Pourquoi étais je si imprévisible, si difficile à canaliser, si déstabilisant pour moi même? Pourquoi avais-je toujours cette aptitude à me mettre au-delà de ma zone de confort?

Prendre du recul sur les émotions

J’ai alors mis en pratique ce que des années de méditation m’avaient appris: j’ai pris du recul. J’ai regardé ces pensées pour pouvoir m’en dissocier. Je n’étais pas ces pensées mais le spectateur qui les regardait: un spectateur impuissant face à ce tumulte certes mais conscient qu’il regarde un film, juste un film, sans savoir comment il va se terminer. Regarder passer ces pensées comme je regardais passer les nuages dans le ciel.

Le malaise restait là mais en même temps je prenais conscience qu’il était un chemin, mais aussi un message de mon âme, que je n’avais pas encore déchiffré. Les émotions sont un langage, les mots de notre être profond pour nous révéler ce dont nous avons besoin sans en avoir forcément conscience.

Devant nous, le col qui ferait de Breckenridge un souvenir lors du Colorado Trail
Devant nous, le col qui ferait de Breckenridge un souvenir

Assez étrangement, à peine la station de ski dépassée, je me sentais mieux et beaucoup plus aligné avec mon être profond. Je notais juste que j’avais du mal avec le retour à la « civilisation « . D’ailleurs l’an dernier, dans la Sierra Nevada, c’était lors des passages en ville que je ressentais le plus fortement ce vide existentiel.

Le malaise est passé, j’ai assisté à sa disparition avec la même impuissance que lors de sa montée en puissance. Étrange impression de n’être finalement pas vraiment maître de sa vie, même si je fais des choix et je prends des directions: je dois parfois me soumettre à des vents bien plus forts que ma volonté et mon besoin de contrôle.

Copper mountain, prochaine station de ski sur le chemin, dans l’axe du sentier lors du trek Colorado Trail
Copper mountain, prochaine station de ski sur le chemin, dans l’axe du sentier

Enchaîner les marathons lors du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Finalement, l’instabilité se dissipe et nous avons le feu vert météo !
Finalement, l’instabilité se dissipe et nous avons le feu vert météo !

Ce jour là, le ciel menaçant finira par témoigner de son indulgence : nous franchissons Kokomo Pass à 17h30, scandaleusement tard compte tenu de la météo classique du Colorado. Mais sous un soleil triomphant, baignés de lumières somptueuses : un miracle de la nature qui allume nos yeux et ouvre notre cœur. Kokomo Pass est l’un des plus beaux cols du parcours et recevoir les grâces célestes quand tous les autres se sont arrêtés depuis longtemps de marcher procure ce sentiment grisant d’être les invités personnels du soleil.

Searle Pass durant le Colorado Trail
Searle Pass

Chaque jour, c’est une routine qui s’installe, un métro boulot dodo de la rando. Réveil à 5h30, tout ranger, marcher 15 miles avant de manger, avec une pause au milieu pour faire sécher la tente car les nuits sont humides. Manger. Repartir pour une dizaine de miles. Manger un peu entre temps. Arriver au camp. Poser sa tente. Déplier matelas et sac de couchage. Se laver à la rivière. Manger. Protéger sa nourriture contre les ours. Fermer les yeux, étendu sous le duvet. Il est 20h.

Le lendemain, il faudra remettre ça, aligner entre 25 et 28 miles, soit plus de 40km par jour. Ce rythme est la rançon pour accumuler ces miles. Je n’avais pas prévu d’aller si vite. Je découvre de nouvelles capacités en moi, mais je sens aussi une fatigue s’installer, car je ne récupère pas vraiment.  Les deux oiseaux qui m’accompagnent n’avancent pas comme des limaces, du coup moi non plus.

Lumières magiques de fin de journée sous Kokomo Pass lors du trek Colorado Trail
Lumières magiques de fin de journée sous Kokomo Pass

C’est quand même vraiment beau chez nous

Encore un coup de chance : orage à Twin Lakes, pendant que nous profitons de l’abri du general store lors du notre trek sur le Colorado trail
Encore un coup de chance : orage à Twin Lakes, pendant que nous profitons de l’abri du general store

Je ne suis pas enthousiasmé par les paysages. Egrainer les heures en forêt ne me transcende pas. Mais lorsque nous entamons après un ravitaillement à Twin Lakes les Collegiate West, un massif réputé pour sa beauté, j’ai l’impression d’être dans les Pyrénées, mais pas là où c’est le plus beau. Des paysages jolis, reconnaissons-le, mais qui me rappellent combien notre pays est beau. Je pense à tous ces coins somptueux que j’ai parcourus chez moi ces dernières années : j’ai été bien plus touché par leur beauté que je ne le suis ici. Il faut dire que le granite domine, et qu’il n’est pas le meilleur ami de mes yeux, bien plus envoûtés par le calcaire.

Parfois, le granite se dépasse et invente des formes et des montagnes improbables. Ici, il manque d’imagination. Je ne suis pas pour cet émerveillement obligatoire dès lors qu’on quitte notre pays, dès lors même qu’on est dans la nature. Préférant associer merveille et rareté. Je ne savoure pas moins : j’aime être dans ces montagnes, même si je ne leur reconnais rien d’exceptionnel, la nature est mon grenier et nourrit ce qu’il y a de plus profond en moi.

Par contre, nous avons plaidé notre cause auprès du soleil. Il nous a accordé un verdict favorable et a prononcé le bannissement de la mousson. Notre chance est insolente, comme en témoignent ces photos des Collegiate West…

Par ici, ça me rappelle parfois les Pyrénées lors du voyage Colorado Trail
Par ici, ça me rappelle parfois les Pyrénées

Encore plus de miles chaque jour, lors du Colorado Trail et du Continental Divide Trail

Détente à Salida lors du trek sur la Colorado Trail
Détente à Salida

Entre Salida (point de ravitaillement après les Collegiate) et Lake City (point de ravitaillement après les Cochetopa Hills) nous avons parcouru 170km en 3 jours et demi. Plus de 48km par jour. C’était plutôt plat (enfin quand même 1200 à 1400m de D+ par jour) et assez roulant. Nous avons donc pu nous fatiguer à souhait. Les paysages parfois trop forestiers ont facilité la progression car on n’avait pas matière à contempler la montagne. Les Cochetopa Hills sont des collines boisées sans grand intérêt visuel hautes de 3000m quand même qui laissent aussi la place à des hauts plateaux qui eux sont vraiment magnifiques.

Paysage envoûtant sur les hauts plateaux lors du Colorado Trail
Paysage envoûtant sur les hauts plateaux

Comment occuper ses journées quand on marche sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

Paysages typiques des Cochetopas lors du Colorado Trail
Paysages typiques des Cochetopas
Un soir au camp lors du trek sur le Colorado Trail
Un soir au camp

Pour faire face à ces longues journées les américains ont tendances à sortir les écouteurs et envoyer de la musique ou autre. Je préfère l’expérience brute et directe de la vie, sans essayer de trouver de moyen de m’échapper. Écouter le vent dans les arbres, le sentir effleurer ma peau, entendre le chant des oiseaux ou simplement expérimenter le ras le bol, l’état du moment. Je recherche surtout la présence, être là, sentir que je fais partie du tout. Je n’ai pas tellement besoin des écouteurs, parfois la pensée suffit à m’évader…

Contempler la beauté de ce qui m’entoure sur le Colorado Trail
Contempler la beauté de ce qui m’entoure

Immersion dans la nature pendant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

Ce n’est pas toujours possible d’être là ou même de profiter. Parfois la fatigue est trop forte et elle empêche l’instant de prendre toute sa saveur. Mais si je ne savoure pas sur le moment la joie que je ressens dans le repos, la joie d’avoir parcouru le chemin, est un peu comme la fleur qui est née de la graine enfouie km après km: elle germe après avoir été arrosée sous la douche chaude!

Le plaisir ne vient pas des paysages plus beaux que d’autres. Il vient de cette immersion continue dans la nature, au rythme des pas, de la respiration, du regard qui contemple un papillon ou de l’oreille qui entend l’oiseau chanter. Marcher toute la journée et tous les jours dans la nature, c’est avoir une vie assez simple en fait : j’ai trouvé beaucoup de joie de vivre dans cette simplicité.

Les furieux

Lever de soleil dans les Cochetopas
Lever de soleil dans les Cochetopas

Pendant que nous traversons ces collines nous avons été doublés par des cyclistes ultra légers qui faisaient une course de 750km en VTT. Ces gens-là sont des vrais furieux. Ils ne dorment pas beaucoup et doivent même pousser leur vélo dans les portions les plus raides. Le plus drôle c’est que j’étais plus rapide qu’eux en montée. Ça devait être moins drôle pour eux de se faire doubler par des randonneurs. Mais ils se rattrapaient largement dès que ça devenait roulant.

Deux VTTistes qui finiront par me rattraper sur le Colorado Trail
Deux VTTistes qui finiront par me rattraper

Arrivée dans les San Juans durant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

Remontée de Cochetopa Creek vers San Luis Pass
Remontée de Cochetopa Creek vers San Luis Pass

Les San Juans sont des montagnes volcaniques du sud du Colorado. C’est un massif important que je mettrai 2 semaines à traverser. Nous y arrivons 20 miles avant Lake City, je n’en sortirai qu’à la fin de ma randonnée.

Des cheminées de fées attestent de l’activité volcanique lors du trek Colorado Trail
Des cheminées de fées attestent de l’activité volcanique

Il accueille surtout des montagnes aux couleurs improbables, aux formes inédites : les San Juans, c’est un restaurant de gastronomie visuelle. Le chef paysager nous propose un menu très relevé (le chemin monte à plus de 4000m) mais sans cesse renouvelé. Nos yeux n’auront pas le temps de s’habituer qu’un nouveau paysage leur sera déjà servi.

En descendant d’un col sur le Colorado Trail
En descendant d’un col
Snow Mesa, un haut plateau avant Lake City
Snow Mesa, un haut plateau avant Lake City
Lake City, comme un air de far west, les voitures en plus
Lake City, comme un air de far west, les voitures en plus

Malgré une journée de repos à Lake City, je ne sens plus la vigueur qui m’animait au départ. Les miles me coûtent plus cher. Après avoir touché le plus haut point du Colorado Trail, je connais une grande panne l’après midi. J’avance toujours aussi vite, mais au fond je suis vidé : je ne récupérai jamais de cette fatigue durant mon voyage. Je suis seul : Alex et Caroline sont partis 2h plus tôt de Lake City et je ne les ai pas retrouvés.

Retour sur les hauts plateaux lors du Colorado Trail
Retour sur les hauts plateaux

Repos physique et linguistique

Quand le paysage m’aide à avancer malgré la fatigue lors de trek du Colorado Trail
Quand le paysage m’aide à avancer malgré la fatigue

Alors que j’arrive à Stony Pass, traversée par une piste fréquentée par les véhicules tout terrain, je décide de faire du stop vers Silverton.  J’aurais pu y aller à pied, mais le chemin pour y arriver ne présente pas trop d’intérêt. Et puis je suis bientôt rendu à ce point où le Colorado Trail et le Continental Divide Trail se font leurs adieux (6 miles après Stony Pass) : j’ai quelques jours d’avances (merci les marathons) et je compte bien utiliser une partie de cette avance pour aller explorer des miles du Colorado Trail que je n’aurais jamais vu si j’étais resté sur le CDT. Faire du stop me donnait aussi du répit et allégeait ma journée.

Mine sous Stony Pass sur le Colorado trail
Mine sous Stony Pass

Après un long moment, je rencontre des américains qui m’offrent le trajet vers Silverton et vers la section du CT que je voulais parcourir. Ces américains avaient vécu un moment juste à côté de chez moi et ils parlaient français. J’aime parler anglais, mais parler français c’est à mon cerveau que la douche chaude est à mon corps.

La soif

Molas Lake
Molas Lake

17h. Je suis à Molas Lake, de nouveau sur le CT. Je me lance pour 7 ou 8 miles. Sans eau. Convaincu qu’il y en a tout près. L’application Guthook me le confirme : des randonneurs l’ont signalé. Seulement je ne prête pas attention à la date de ce rapport : 26 juillet : il y a 2 semaines.

La lumière magique du soleil couchant sur le Colorado Trail
La lumière magique du soleil couchant

Lorsque j’arrive aux ruisseaux, ils sont secs et moi aussi. J’ai soif. Je continue : tout est sec. Je vais tenter ma chance en poussant plus et soumettre mon corps à une diète aqueuse. De la chance, j’en ai eue : en discutant avec 2 randonneurs avant de me lancer, j’avais appris qu’il y avait 2 étangs en contrebas du chemin et non mentionnés par Guthook.

Il y a de l’eau dans l’étang !
Il y a de l’eau dans l’étang !

Je me disais que si la vie m’avait donné cette information, sans laquelle j’aurais fait demi-tour, c’était sans doute pour que j’aille jusqu’à ces étangs. Pour les trouver secs ou généreusement remplis, je ne sais pas, mais je faisais confiance à ce signe du destin. Les paysages en cette fin d’après-midi me gâtent et font oublier la soif. Je suis comblé.

Reflets sur l’étang lors du voyage sur le Colorado Trail
Reflets sur l’étang

Comblé mais inquiet de ne pas trouver d’eau, de devoir faire 7 miles en sens inverse si les étangs sont secs, soit 15 miles sans eau. J’ai de la chance : l’eau est bien là et même si elle a un goût très vaseux, je suis plein de gratitude pour ce plaisir simple.

Merveilles naturelles

Le lendemain, je suis plongé dans les plus beaux paysages du parcours : un feu d’artifice de géologie.

Les deux étangs où j’ai passé la nuit sur le Colorado Trail
Les deux étangs où j’ai passé la nuit

Au détour du chemin, j’attends Caroline et Alex : je sais que je suis devant eux et je sais à peu près à quelle heure ils vont passer. Je leur fais la surprise de ma présence, eux qui me croyaient derrière : mon stop de la veille m’a donné beaucoup d’avance. Nous célébrons nos retrouvailles et notre au revoir : la semaine qui suit, je viendrai à Salt Lake avant de m’enfoncer dans le Wyoming. Je poursuis mon chemin, hors du CT, vers Engineer Mountain, un des plus beaux sommets que j’ai pu voir. Le chemin est balisé par des sapins et traverse des alpages verdoyants, sur fond de montagne élancées : mes rêves les plus fous n’auraient jamais pu m’apporter cette perfection-là.

La suite du Colorado Trail que je ne verrai que de loin à mon grand regret
La suite du CT, que je ne verrai que de loin à mon grand regret

En solitaire…

Cela faisait un moment que j’avais envie de me retrouver seul. Je me sentais déjà assez seul en compagnie d’Alex et de Caroline. Je ne comprenais pas toujours bien Alex qui parlait très vite et avec la fatigue parler anglais me demandait un effort supplémentaire que je ne pouvais pas toujours fournir. Et puis nous n’avions pas le même rythme : peu à peu, nous avons réduit les moments partagés jusqu’à ce qu’ils ne tiennent qu’au repas du soir. J’essayais de coller à leur rythme (Alex suivant Caroline), mais au fond cela ne m’allait pas et j’avais envie de vivre à mon propre rythme, de me retrouver.

Ambiance western à Silverton
Ambiance western à Silverton

Pourtant, de retour à Silverton avant de me lancer sur le CDT, je suis partagé. Je vais être seul car les amis qui m’accompagnaient vont finir le CT. C’était prévu comme ça. En un sens je suis très heureux de me retrouver seul parce que c’était quelque chose que je voulais expérimenter pour trouver réponse à certaines questions: que suis-je quand je fais face au vide? Qui sui- je aussi dans ces moments-là? Qu’y a-t-il au fond de nous quand on s’est dépouillé de toutes ces choses qui nous occupent et nous évitent de nous confronter au Rien, au vide? J’ai donc matière à m’occuper avec ces questions métaphysiques mais pour autant très concrètes dans ma démarche.

…dans le mauvais temps

D’un autre côté le groupe est une vraie force motrice pour avancer et fournit aussi une sécurité affective très agréable. Et puis, pas de bol, le temps retourne à l’instabilité dès demain alors que je me lance dans la partie la plus sauvage et la moins fréquentée du parcours. Je vais donc devoir faire face seul aux orages. Ce n’est pas parce qu’on est 3 que la foudre ne va pas nous tomber dessus mais au moins on peut se tenir la main, ça donne le sentiment d’être un peu moins vulnérable. Bon je sais quand même bien faire face à ce genre d’événement donc je ne cours pas au suicide. Mais j’ai un peu peur.

Weminuche Wilderness, étape traversée pendant mon expérience sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

Un matin, dans Weminuche Wilderness
Un matin, dans Weminuche Wilderness

5h30. Implacable, mon téléphone ordonne que je m’extirpe de mon duvet. Les étoiles brillent au-dessus de ma tête. Le jour commence à poindre et je suis bien dans ma tente. Les étoiles qui brillent ce sont des cristaux de glace. Les gelées ont été vraiment fortes cette nuit. Dans mon duvet, je n’ai rien ressenti de particulier, au chaud juste avec un t shirt et mon boxer. Le luxe ne tient qu’à quelques plumes bien tassées. Par contre, l’air glacial me brûle le nez, mais c’est toutes les nuits la même histoire. Il faudrait réfléchir à un duvet pour narines. J’ai du mal ce matin. Et ce n’est pas que le froid.

Weminuche, dans les derniers miles partagés avec le Colorado trail
Weminuche, dans les derniers miles partagés avec le CT

Les deux derniers jours m’ont épuisé. Weminuche Wilderness accueille le sentier sur des endroits très exposés aux orages. Il faut donc passer vite si le temps est instable. Pas de chance pour moi, l’instabilité qui avait pris des vacances revient en force alors que je me mets les pieds dans le coin le plus sauvage du voyage.

Vaincre les nuages

L’instabilité gagne du terrain lors de notre trek sur le Colorado Trail
L’instabilité gagne du terrain

Alors je vais vite, très vite. J’abats les miles les uns après les autres et plus les nuages montent plus je me presse. J’engage une course contre les orages. Je vais la gagner. Mais alors je pousse mes capacités à leur limite, je ne le sais pas. Je sais juste que je veux me retrouver de l’autre côté du col au plus vite. Je suis à plus de 3500m mais je suis acclimaté maintenant.

Terrain granitique et bush durant la marche sur le Colorado Trail
Terrain granitique et bush

Le sentier est exigeant, piégeux: du bush recouvre entrave le passage et oblige le randonneur à forcer le passage, non sans griffures; des cailloux ne pardonneraient pas la moindre inattention. J’en oublie presque de regarder le paysage ! Bon ce n’est pas si grave, c’est un paysage granitique très classique et je ne suis pas un grand fan de ces cailloux-là. Lorsque je débouche au col, les nuages ne sont pas encore tombés sur la terre, avec le fracas du tonnerre.

Arrivé au col, j’ai été plus vite que les nuages lors du Colorado Trail
Arrivé au col, j’ai été plus vite que les nuages

30km en zone exposée

Déjà 30km parcourus. Il me faut encore faire 13 ou 14km. Je mange comme je peux, refiltre de l’eau, m’initie à la saveur chimique du gatorade en poudre et repars. Le chemin est un combat contre le bush. J’aurais aimé être le Moïse du bush pour qu’il s’écarte à mon passage mais je ne suis qu’un randonneur qui devra pousser les branches comme tout le monde. Teintés de ciel gris, les paysages moroses ne me donnent pas ce surcroît de motivation qui faciliterait les innombrables micro-montées, si longues pour mes jambes fatiguées. La pluie s’invite dans le paysage mais laisse la place au-dessus de ma tête au tonnerre.

L’orage est bien là, même si la photo ne fait pas de bruit !
L’orage est bien là, même si la photo ne fait pas de bruit !

Je maugrée, m’insurgeant contre cette injustice d’être au seul endroit où l’orage gronde, indigné par ces miles qui ne défilent pas, inquiet d’être mouillé, de faire face au feu du ciel. J’arrive au campement. Pas de pluie. Le coucher de soleil sur le lac est somptueux. Le ciel sait se faire pardonner.

Un moment magique sur le Colorado Trail
Un moment magique

Le lendemain, je remets ça. J’ai presque 30km à parcourir avant d’être sorti de la zone exposée. Ce coup-ci les paysages se parent d’atours bien plus attrayants. Dès que le granite s’en va, mes yeux s’enivrent du paysage. Je passe à côté de la brèche de Roland locale. Je salue cet homologue américain qui vient me rappeler combien mon pays est beau.

Un itinéraire souvent en crête…sur le Colorado trail
Un itinéraire souvent en crête…
Vue dominante sur les meadows (clairières ou prairies) lors du trek sur le Colorado Trail
…qui domine des meadows (clairières ou prairies)

Point de rupture

Il fait encore beau, mais le temps est déjà en train de tourner sur le Colorado trail
Il fait encore beau, mais le temps est déjà en train de tourner

10h10. Les nuages bourgeonnants annoncent la suite: il va falloir faire très vite. La course recommence. Je monte très vite, à plus de 5km/h. Les nuages montent plus vite et bientôt je suis menacé.

En peu de temps, le ciel s’est déjà bien chargé durant notre trek sur le Colorado Trail
En peu de temps, le ciel s’est déjà bien chargé

Devant moi, le sommet, encore à quelques miles. Et puis ce nuage très noir juste au-dessus. Les nuages les plus menaçants de tout le paysage sont là où je vais. De nouveau, je m’insurge. Vanité témoin de mon impuissance et aussi de ma fatigue qui ne me permet plus de gérer mes émotions correctement. Mais je renonce vite à la colère pour m’incliner devant ce qui est et que je dois accepter. Pour autant, je fonce sur le sommet que j’atteins enfin, épuisé. Je ne connaissais pas cette sensation de celui qui a tout donné. Les derniers mètres me coûtent une fortune en persévérance.

Je lance un coup d’œil inquiet aux alentours : l’orage se répand comme une trainée de poudre sur le Colorado trail
Je lance un coup d’œil inquiet aux alentours : l’orage se répand comme une trainée de poudre

Gueule de bois du randonneur

J’arrive là-haut titubant, à bout de souffle. Je savoure quelques instants, puis engage la descente. Je n’ai plus long avant le camp mais je ne me sens plus très lucide. Mon pas n’est plus sûr. Le camp. J’ai quelques hallucinations. C’est plutôt marrant. Mais je sens que si je pousse encore plus loin mes limites, je vais me mettre en danger.

Autour de moi, ça tonne et ça tombe lors de la marche sur le Colorado trail
Autour de moi, ça tonne et ça tombe

Boire. Manger. S’allonger. Se laver. Remanger. Se rallonger. Jouer au solitaire, lire, puis fermer les yeux. Se réveiller à la lumière des éclairs. Ouvrir la tente et découvrir que l’orage est loin, mais combien le ciel étoilé est une merveille que je semble redécouvrir à chaque fois. Attendre 3h pour se rendormir. Et finalement se réveiller sous les étoiles de glace.

Tente glacée sur le Colorado trail
Tente glacée

Ce jour-là, je paie comptant les excès de la veille. J’ai la gueule de bois du randonneur. Je marche, j’avance, mais je suis privé du plaisir de la découverte des paysages. Jambes lourdes, énergie défaillante, même boire me fatigue et me demande de reprendre mon souffle. Je ferai 38 km et 1700m de D+ ce jour-là pourtant.

« The knife edge », un endroit à éviter quand il y a de l’orage !
« The knife edge », un endroit à éviter quand il y a de l’orage !

La lumière intérieure

Je m’arrête un moment pour me nourrir de la beauté du lieu durant notre trek sur le Colorado trail
Je m’arrête un moment pour me nourrir de la beauté du lieu

Je n’ai pas ressenti le plaisir habituel pendant ces 38km. Mais ces paysages sont gravés en moi et comme une graine semée dans l’hiver, ils viendront germer, mûrir et donner les fruits des meilleurs souvenirs lorsque le temps sera venu. Ils me rappelleront combien ces moments sont magiques, uniques, nourrissants, purifiants, lumineux. Et je sais déjà combien ces paysages m’ont porté, au sens littéral comme au fond de mon coeur, combien ils ont aimé mon âme, au point qu’aujourd’hui j’ai envie de leur rendre hommage en écrivant leur beauté.

Dernière journée de temps stable, une aubaine alors que je traverse ces merveilles naturelles durant le Colorado Trail
Dernière journée de temps stable, une aubaine alors que je traverse ces merveilles naturelles

Je recherchais des réponses sur la solitude en partant, comme je le disais plus haut. Elles sont venues très vite, après un échange chaleureux avec des randonneurs que j’avais déjà croisés. Je n’ai pas trouvé ce rien dont je parlais. J’ai trouvé son contraire : un profond sentiment d’unité, de connexion avec les mouvements de la vie, que certains maîtres spirituels appellent l’Amour. Pas vraiment au sens de ce que l’on ressent en couple ou pour sa famille.

L’Amour

Plus dans le sens d’une acceptation de ce qui est, d’un sentiment de faire partie d’un tout, d’être relié à tout ce qui nous entoure. L’Amour est un des contraires de la solitude. Quand on sent porté par la présence des êtres chers, même si elle n’est qu’une pensée , quand on se sent aimé par les paysages et qu’on les aime en retour. Il est difficile de se sentir seul, et ce vide n’est plus. Ce vide n’est que l’âme qui s’est déconnectée du monde. C’est sûrement un peu difficile à appréhender quand on ne l’a pas touché du doigt, mais je voulais partager ce ressenti si fort et si particulier. J’étais venu parcourir cette voie intérieure. Elle ne m’a pas déçu.

Dernière nuit dans Weminuche Wilderness

Weminuche Wilderness pourrait être un parc national tant cet espace est préservé et isolé. Au cours de ma traversée de 130km environ je n’ai vu qu’une seule piste pour véhicule tout terrain, aucune route, jamais pu apercevoir la civilisation. Bref c’est un lieu très sauvage et très éloigné de tout milieu urbain, voire de tout moyen de s’échapper. Et en plus c’est vaste. Lors de ma traversée de 134 km je n’ai rencontré que 10 randonneurs et une équipe de travailleurs chargés de l’entretien des sentiers. La sensation d’isolement est donc très importante. Je me sentais totalement immergé dans la nature, seul sans ressentir de solitude. Voilà pour le tableau.

Où que se porte le regard, il n’y a pas de signe d’activité humaine, hormis le sentier du Colorado Trail
Où que se porte le regard, il n’y a pas de signe d’activité humaine, hormis le sentier

C’est mon dernier bivouac dans la réserve. Choisir son bivouac n’est pas la chose la plus simple. Il faut un terrain plat, de l’eau pas loin si possible, un terrain pas trop exposé aux orages, un terrain protégé du vent, si possible une jolie vue, il faut s’organiser pour éviter les intrusions d’ours dans la tente. Bref ça prend du temps.

Après avoir trouvé un joli terrain, pris soin d’évacuer mes odeurs corporelles au ruisseau, chargé mon estomac de 2 dîners à 2h d’intervalle (la bête sans nom qui loge dans mon estomac ne se satisfait pas de peu), je finissai par m’enfouir sous le duvet pour céder aux avances d’un sommeil plus que séduisant.

Hurlements

Il faisait nuit noire quand je me réveillai. J’ai l’habitude de me réveiller au moins 124 fois par nuit sous la tente. C’est dur mais c’est comme ça: je ne suis pas un bon dormeur dans un lit, je le suis encore moins sous la tente. Je ne peux que crier grâce lorsque le réveil sonne à 5h30 tous les matins. C’est ça ou la foudre (merci la météo du Colorado), alors je ne négocie pas. Je me réveille donc, je me retourne car j’ai mal partout (je dois avoir 80 ans quand je dors), et un bruit me glace le sang.

Ce n’est pas qu’un bruit, ce sont des hurlements. Très près, difficile d’établir la distance, mais pas plus de quelques centaines de mètres. J’ai déjà entendu ça dans le Vercors, un loup. Sauf que là, il y a plusieurs animaux, je ne sais pas combien. Je ne sais pas non plus si le loup est présent dans la réserve ou si ce sont des coyotes, des cousins du loup en plus petit. Mon sang s’est pétrifié, on aurait dit que ces hurlements sonnaient le haro sur la proie qu’ils avaient repérée. Et si c’était moi leur proie? Je ne connais pas les habitudes alimentaires de ces canidés mais je me sens assez démuni au milieu de cette nature sauvage pour envisager d’être la proie. C’est peut être ridicule mais seul au milieu de nulle part en pleine nuit on se sent très vulnérable.

Se préparer à une attaque

Je bondis alors de mon duvet et j’attrape dans mon sac à dos tout ce qui pourrait me servir de moyen de défense, des éléments bien dérisoires si jamais je venais à être vraiment attaqué mais je ne compte pas me laisser faire. Ma frontale pour les éblouir, mon couteau moins sa pointe restée coincée dans une racine alors que j’essayais vainement d’extraire une sardine bien plantée, mon spray anti moustique (à 10cm ça peut faire effet!) et mon réchaud parce que ça doit pas aimer le feu ces bêtes-là.

Et puis j’attends. J’attends de voir si ces bêtes vont venir me chercher, protégé dans mon château de toile et de plume. Le temps passe. Rien. J’écoute. Le bruit du vent dans la toile de la tente. L’eau du ruisseau. Le crissement du matelas quand je bouge. Je cherche des pas, un signe d’une proximité du prédateur. Rien. Puis je cherche le sommeil, parce que demain j’ai plus de 33km de marche et que j’ai d’autres choses à faire que de me demander si je vais finir sous les crocs d’un improbable loup qui doit d’ailleurs préférer les daims aux randonneurs maigrichons comme moi. Je me rendors. Je me réveille encore et encore. Et de nouveau, les hurlements. Mon sang est de nouveau glacé. Ils ne sont pas venu la dernière fois, ils ne viendront pas cette fois, me dis-je. Non, ils ne viendront pas.

Vivant

Ma tente ce matin-là lors de la marche sur le Colorado Trail
Ma tente ce matin-là

Le matin, mon téléphone sonne la fin de la nuit. Mon corps est intact. Aucun croc n’est venu se planter dans ma chair. Petite victoire, mais il va falloir que je livre une nouvelle bataille: s’habiller dans le gel, prendre le petit déjeuner en terrasse par moins je ne sais pas combien, et mettre le sac sur le dos. Heureusement, la nature est généreuse et offre tous les jours le spectacle éblouissant du soleil levant. Un petit encouragement qui ne fait pas de mal.

Mon dernier col à près de 4000m d’altitude lors du trek au Colorado Trail
Mon dernier col à près de 4000m d’altitude

La mousson

Cumbress pass. Pas final. C’est terminé. C’est déjà/enfin terminé. Je ne sais pas ce qui criait grâce le plus fort entre mes chaussures épuisées par plus de 900 km de sentiers abrasifs, qui maintenant vont vivre une nouvelle vie de savates de jardinage, mes pieds perclus d’ampoules, mes jambes intolérantes au dénivelé positif, mon dos implorant un vrai lit ou mon épaule poignardée par une violente contracture.

Il était temps que je pose mon sac, j’étais arrivé au bout de ce que je pouvais donner à ce chemin. Mais 26 jours passent si vite. Je n’ai pas eu l’impression de marcher si longtemps. Pourtant je suis allé plus loin et plus vite que je ne l’ai jamais fait. Et si mon esprit n’a pas enregistré le parcours, mon corps endolori témoignait bien de la difficulté du chemin. La sagesse silencieuse du corps qui ne parle qu’à travers des sensations sait bien se rappeler à l’esprit toujours avide de plus.

Près de Wolf Creek Pass : j’ai encore battu les orages mais il s’en est fallu de peu
Près de Wolf Creek Pass : j’ai encore battu les orages mais il s’en est fallu de peu

Une météo capricieuse

Et puis j’étais lassé de jouer à la roulette russe avec la météo capricieuse. Depuis Weminuche Wilderness, les orages avaient été quotidiens et imposaient leur volonté irrationnelle sur les montagnes. Ici, les orages ne sont pas comme chez nous. Ils parlent une autre langue. Si je pouvais lire la météo pyrénéenne, ici je n’étais pas Champollion mais plutôt un joueur de poker qui parfois misait gros.

Les orages ne se développent pas sur les sommets pour ensuite se répandre aux alentours. Ils viennent de nulle part et balaient une zone aléatoire poussés par des vents changeants. Le bon côté, c’est qu’ils sont très dynamiques et sont assez polis pour ne pas importuner le randonneur plus d’une demi-heure. Le mauvais côté, c’est qu’ils n’envoient pas de faire-part longtemps à l’avance. Ils arrivent vite et parfois sans avoir la gentillesse de prévenir.

Passer entre les gouttes (enfin, essayer)

 Weminuche était exposée. South San Juan l’était encore plus. En quittant South Fork pour achever ma traversée, je savais que le menu météo serait épicé et que je ne passerais au travers des gouttes qu’à condition de marcher jusqu’à midi environ. D’un autre côté, Karla, la trail angel qui avait bien pris soin de moi à South Fork, m’avait prévenu: faire du stop depuis Cumbres Pass était difficile; il valait mieux que j’arrive en avance.

Et comme j’avais un avion à prendre, je ne voulais pas me rater. Deux logiques opposées. Il ne fallait pas trop me pousser pour que j’opte pour du vite fait bien fait au diable les orages. J’ai cette tendance naturelle à préférer faire trop que pas assez (c’est peut-être pour ça que je suis fatigué au bout du chemin non?) et faire les choses à la cool est aussi naturel chez moi que dépenser mon argent dans les magasins de fringues à la mode.

Je vais donc tenter la traversée en 3 jours au lieu de 4 comme prévu. Sur le papier: 70 miles, 2400m de D+. Faisable. Je quitte donc South Fork à toute vitesse, marchant d’un bon pas et avalant les 32 premiers kilomètres avec la légèreté et l’insouciance d’une sitcom des années 90. Pour arriver vers 13h sur les 16 derniers kilomètres en terrain exposé, parce que la vie aimé bien me lancer des défis et que la météo a dû se dire que je n’aurais rien à raconter si jamais je ne me frottais pas aux rigueurs du climat local.

Faire le bon choix

Devant moi, la section très exposée hérissée de très beaux sommets sur le Colorado Trail
Devant moi, la section très exposée hérissée de très beaux sommets

Me voilà donc parti sous un soleil éphémère, bien conscient que si des bookmakers devaient s’intéresser à mon sort, ils miseraient peut être sur mon électrocution. Le sentier, d’abord avenant, s’efface au profit d’une sente incertaine, jalonnée de cairns. Le paysage est somptueux, mais les nuages massés prophétisant l’imminence du cataclysme interdisent une jolie photo.

Très vite, je comprends que je ne vais pas échapper à l’orage aujourd’hui sur le Colorado Trail
Très vite, je comprends que je ne vais pas échapper à l’orage aujourd’hui

Je ne lutte plus contre les orages: je ne pousserai pas mon corps au-delà de ses limites, je ne ragerai pas contre les éléments. Je tente humblement la traversée, sollicitant auprès des gardiens du ciel un droit de passage. Grondement sourd. Je continue. Grondement sourd un peu plus proche. « Julien n’as-tu pas entendu le message ? » Je fais le point : le sentier va m’emmener près d’un sommet et l’orage est juste là.

Attendre

Je peux me replier plus bas vers un lac ou continuer et témoigner au ciel de mon intrépidité. Saint Pierre doit être très intéressant et avoir beaucoup de choses à dire mais je n’ai pas envie d’aller le rencontrer. Je vais donc m’abriter dans un bosquet près du lac, prêt à y passer la nuit. J’attends la fin du monde, le ciel est noir comme un uniforme de la gestapo.

Dans les arbres en attendant l’accalmie durant le trek sur le Colorado trail
Dans les arbres en attendant l’accalmie

J’attends, mais je n’aurai droit qu’à quelques larmes du ciel, décidément bien clément. Je repars, prudemment, hors sentier et plus bas, pour le cas où quelques nuages farceurs auraient décidés de se cacher en attendant que je montre le bout de mon nez. Mais plus rien, des nuages certes, mais très aimables. L’orage s’abattra juste à côté déversant 30mn de grêle sur les malheureux qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. Je finis ma journée aux aguets et épuisé. Je n’ai plus l’énergie pour avaler presque 50km, j’ai dû faire un crédit que je rembourserai à l’usure de mes jambes fatiguées.

Loup y est-tu ? sur le sentier du Colorado trail
Loup y es-tu ?

Menaces

Au petit matin, les nuages viennent me saluer en avance sur le Colorado Trail
Au petit matin, les nuages viennent me saluer en avance

Je paie mes traites dès les premières montées du lendemain. Le temps est déjà nuageux. Promesse d’une journée agitée plus que d’habitude. Je savoure le soleil qui prendra bientôt quelques heures de repos, je savoure ces pics volcaniques sauvages et libres face auxquels un millier de ces miss France et autres à la beauté fade et convenue ne sauraient faire le poids, je savoure ces pentes solitaires. Le ciel m’épargne pour le moment.

Arrive l’heure fatidique et me voici encore aux pieds d’une section très exposée. Le temps est instable évidemment. C’est comme si il jouait une partie de poker avec moi. Jusqu’à présent il a su bluffer avec brio. Contrairement à hier, une fois là-haut j’aurai très peu d’espace pour me protéger. Si le temps a des cartes solides à jouer là-haut, je vais passer un très mauvais moment. Un moment de 15km quand même.

La confiance comme baromètre

Voilà à quoi ressemble le ciel quand je prends ma décision durant le trek sur le Colorado Trail
Voilà à quoi ressemble le ciel quand je prends ma décision

Prendre son repas. Refaire son sac. Calculer les échappatoires possibles. Se rendre compte qu’il n’y en a presque pas. Ressentir une petite boule dans le ventre. Se demander si les soldats qui montaient au feu ressentaient la même chose. Se lancer. Parce que la confiance est ce sol sur lequel je marche. En mes capacités à prendre la bonne décision. Mais surtout en la Vie, qui m’a toujours donné ce dont j’avais besoin, qui m’a guidé jusque-là lorsque je l’ai écoutée, fort d’une profonde connexion avec le tout.

Le ciel me sourit durant le trek sur le Colorado trail
Le ciel me sourit

Lorsqu’on sent cette connexion, c’est comme si le rationnel, le monde des 5 sens, le mental s’effaçaient au profit d’une dimension intuitive, directe, non réfléchie mais pas moins pertinente. On se permet d’oser parce que nous avons senti que nous pouvions sortir des sentiers battus, qu’une énergie différente nous appelait à créer, à prendre le risque de la vie. J’ai confiance, mais j’ai peur aussi. La confiance l’emporte. Les ténèbres ne survivent pas au soleil. Les orages non plus. J’ai une chance incroyable. La météo menaçante vient me sourire d’un air narquois, me disant presque: « t’y as cru à l’orage hein?? » Et puis elle va déverser son trop plein de grêle plus loin, laissant le soleil illuminer mon chemin.

Aucun sentier, terrain exposé : il vaut mieux éviter le mauvais temps ici… lors du trek sur le Colorado Trail
Aucun sentier, terrain exposé : il vaut mieux éviter le mauvais temps ici…

Ultimes miles

La « Tierra Amarilla » : la terre jaune
Cet endroit s’appelle la « Tierra Amarilla », la terre jaune

Dernière nuit sur le continental divide trail. Derniers miles, la météo vient encore me taquiner sur les endroits exposés dès le matin. Elle doit aimer me sentir sur la brèche. Je ne savais pas que la météo était si sensible et avait le sens de l’humour.

La route est là, juste en bas, ça sent la fin !
La route est là, juste en bas, ça sent la fin !

Je finis. La fin n’est pas vraiment la fin, c’est plutôt la continuation vers autre chose. C’est une porte par laquelle on passe pour se rendre dans une nouvelle étape de sa vie. Je n’ai pas vraiment de nostalgie. Pas encore. La nostalgie s’invitera peut être à l’improviste plus tard, lorsque j’aurais oublié combien j’avais besoin de repos, combien mon corps avait donné plus qu’il ne devait, quand les vagues du temps auront effacé les châteaux de sable des douleurs de la marche au long cours, pour laisser place à un souvenir immaculé. J’étais heureux sur le chemin. Quand je sais que je vais poser mon sac pendant un moment et trouver le repos que je mérite, la fin a une saveur très douce.

Un chemin s’arrête là, un nouveau va bien commencer lors de la marche sur le Colorado Trail
Un chemin s’arrête là, un nouveau va bien commencer

Dernier clin d’œil du ciel

Le chauffeur qui m’a pris en stop n’avait plus de place dans la cabine de son pick up. J’ai donc passé 1h30 à l’arrière, à l’air libre. Le temps, qui a tellement le sens de l’humour, m’a épargné sur le chemin. Je n’ai jamais vraiment été trempé. Par contre il a profité de ma vulnérabilité sur ce pick up pour me recouvrir de grêle et de pluie, plus que je n’ai jamais eu pendant tout le chemin. Amusant quand même…

Une heure et demie de plus au grand air lors du trek au Colarado Trail
Une heure et demie de plus au grand air

Conclusion sur notre Colorado Trail et le Continental Divide Trail

900km et des brouettes. Du dénivelé à volonté. Des paysages grandioses. Des moments lumineux. De bons burgers. Un temps sec. De belles rencontres. Tous les ingrédients d’un trek réussi réunis. Je reviens enchanté et porté par ces instants d’altitudes, qui se sont succédé pendant presque 4 semaines. Si je compare avec la Sierra Nevada, je vote pour le Colorado. Les paysages verdoyants, plus doux, me conviennent mieux. Le granite est moins omniprésent : outre ce qu’il donne à voir, le granite est aussi très usant pour la marche car il génère souvent un terrain très cassant.

Dans le Colorado, les paysages volcaniques prédominent dès les San Juans et leur souvenir continue de m’éblouir. Un massif volcanique offre aussi des paysages beaucoup plus hétérogènes et surprenants. A ceux qui ont moins de temps, je conseille de commencer aux alentours de Gunnison : c’est à partir de là qu’on traverse les hauts plateaux des Cochetopa et que l’on entre ensuite dans les San Juans. Les sections plus au nord présentent moins d’intérêts paysagers et n’emmènent pas le randonneur dans « l’exceptionnel ». Cela reste néanmoins beau, mais ne justifie pas forcément de prendre un avion pour traverser la moitié du globe quand nos montagnes nationales offrent un décor bien plus somptueux.

Un regret aussi : celui de ne pas avoir eu de véhicule pour parcourir les vestiges miniers et notamment les villages fantômes qui jalonnent les San Juans. La prochaine fois !

Par contre la météo très instable est un facteur à prendre très au sérieux, à la fois pour la sécurité mais aussi pour le moral. Cette année a été particulièrement sèche, mais les autres années de nombreux randonneurs abandonnent à cause des pluies quotidiennes. De plus, jouer au poker avec les orages a été vraiment très usant pour moi.

Matériel utilisé durant le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

Matériel de bivouac utilisé sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

CATÉGORIEMODÈLEMARQUEPOURQUOI AVOIR FAIT CE CHOIX AU DÉPART ?CE CHOIX A-T-IL RÉPONDU À MES BESOINS ?SI C’ÉTAIT À REFAIRE
TENTECopper Spur UL1 Tente légère et autoportanteTrès bonne tente, avec de bons rangements, beaucoup d’espace. Montage facile et vraiment solide. Seul bémol : l’ouverture qui n’est pas si pratique car le double toit peut avoir tendance à rentrer dans la tente intérieure en déposant un surplus d’humidité.Je ne changerai rien.
MATELASNeo Air X ThermTHERMARESTUltra légerComplètement : matelas très confortable de surcroit.Je ne changerai rien.
SAC DE COUCHAGEPanyam 450CUMULUSTrès léger (850g) et thermique.Parfait pour les températures très froides de l’été au Colorado.Je ne changerai rien.
DRAP DE SACThermolite ReactorSEA TO SUMMITGagner quelques degrés et protéger le sac de couchage des odeurs et de la saleté.Très bon produit !Je ne changerai rien.
RÉCHAUDMinimoSAWYERTrès économique, puissant, rapide, compact.Incroyablement sobre, le piezzo est un plus mais il ne fonctionne pas toujours, un briquet est nécessaire en appoint.Je ne changerai rien.
LAMPE FRONTALEStormBLACK DIAMOND.Puissance, étanchéité, rechargeable, dispose d’une fonction de verrouillage.Parfaite. Son régulateur de puissance est un vrai plus pour adapter facilement la luminosité. Cependant, même verrouillée, elle peut s’allumer dans le sac à cause de pressions d’autres objets.Je prendrai une boîte pour la protéger et éviter qu’elle ne s’allume intempestivement.

Chaussures et chaussettes utilisées sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

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CHAUSSURESTor Speed IIHOKA ONE ONEChaussures légères, mid et dotées d’un bon amortiAucun souci à déplorer avec ces chaussures jusqu’à ce que je les pousse à leur limite (plus de 900km avec une seule paire). Très confortables, solides, très bon grip, la membrane Event tient bien l’humidité.Je ne changerai rien.
CHAUSSETTESTrekking Merino LightSIDASGagnées lors d’un concours précédent, solidité et confort.Parfaitement !Je ne changerai rien.
CHAUSSETTES Pro Wool Trek Mid lightMONNETRespirabilité et chaleur.Grosse déception pour cette paire qui s’est usé très rapidement et que j’ai dû jeter à mi-parcours (plus de tissu au tendon d’achille)Je prendrai une autre marque !
CHAUSSURES POUR LE CAMP ET LES TRAVERSÉES DE RIVIÈREClassicCROCSModèle très léger qui protège bien le pied lors des traversées de rivière.Il n’y a eu qu’une seule traversée de torrent !Je prendrai des tongs, plus légères.

Vêtements utilisés sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

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SHORTForclaz 900 ModulQUECHUALégèreté, séchage rapide, poches. Les parties basses du pantalon ont rendu l’âme il y a longtemps, mais le short a tenu bon et s’avère très solide.Parfait !Je ne changerai rien.
SURPANTALONPantalon imperméable Trail RunningKALENJIUne couche imperméable légère pour les moments froids et pluvieux. Très bon marché pour un vêtement respirant.Pas toujours très pratique à enlever quand on a les chaussures aux pieds. Bon isolant contre le froid, jamais testé sous la pluie.Je ne changerai rien.
T-SHIRTLeaf TwistLAFUMARespirabilité.Parfait, la transpiration s’évacue vraiment vite, les odeurs sont peu présentes.Je ne changerai rien.
T SHIRT MLEvolution Warm Turtle Neck ZipODLOChaleur, poids et stretch. Renouvellement de mon Odlo Warm. Déçu car le tissu a été endommagé très rapidement et sans cause apparente. Chaud et agréable à porter.Je ne changerai rien.
DOUDOUNE PLUMELight AlpiSIMONDLégèreté, thermicité, compacité, prix.Bon produit mais mal taillé. La capuche retombe dans les yeux en permanence, sans possibilité de réglage. Un peu trop large aussi.Je prendrai un modèle mieux taillé.
VESTE IMPERMÉABLEStretch ozonicMOUNTAIN HARDWEARImperméabilité, stretch et poids.Taille un peu trop grand (achat en ligne).Je prendrai une taille en dessous (du M alors que je fais 1.90m !)
GANTSG Comp WindCAMPGants légers, assez thermiques et modulables avec la surmoufle qui se range dans la partie supérieure du gant.Très bonne protection thermique.Je ne changerai rien.

Équipement utilisé sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

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BÂTONS DE MARCHETrail BackBLACK DIAMONDLégers, système de verrouillage très pratique, j’en avais une ancienne paire que j’ai dû remplacer après 5 ans d’usage, j’en étais très content.Les pointes s’usent beaucoup plus vite que le modèle antérieur (fragilité sur les plastiques). J’ai perdu les pointes métalliques en chemin, alors que mes bâtons avaient tout juste un an et avaient servi 40 jours…Ce n’est pas la première fois que je constate une grosse baisse dans la qualité chez Black Diamond.Je prendrai des bâtons d’une autre marque.
HOUSSEHousse de compression étanche 25LQUECHUAProtection contre l’eau, gain de volume.Cette housse qui fonctionne par vide d’air permet effectivement de gagner du volume tout en garantissant l’étanchéité. Le système de fermeture prend cependant un peu d’espace.Je ne changerai rien.
HOUSSEHousse imperméable pour vêtements (lot de 3)QUECHUAMaintien au sec des vêtements, légèreté et solidité.Le système de fermeture par scratch ne garantit par contre une immersion du sac mais en cas de pluie il suffit.Je ne changerai rien.
CRÈME SOLAIRESun 30NIVEAProtection solaire.A ma grande surprise, on ne prend pas de coup de soleil dans la Sierra Nevada (d’autres ont constaté la même chose, hors neige bien sûr). La crème est inutile même en altitude dès lors qu’on n’évolue pas sur neige. Je n’en ai jamais mis, hormis une fois pour protéger l’arrière de mes genoux.J’en prendrai beaucoup moins !

Accessoires utilisés sur le Colorado Trail et le Continental Divide Trail

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SAC À DOSAtmos 50OSPREYConfort de portage et accessoirisation, notamment les poches filets qui peuvent recevoir des bouteilles à 45°, très pratiques pour les attraper quand on marche.Absolument parfait. Très solide, presque neuf après 1000km en montagne.Je ne changerai rien.
SERVIETTEPocket TowelSEA TO SUMMITLègère, compacte, séchage rapide.Contrairement à mon précédent roadbook où je regrettais les odeurs qui s’incrustaient dans la serviette, je n’ai pas eu à m’en plaindre cette fois-ci.Je ne changerai rien.
COUVERTSpork TitaniumLIGHT MY FIRELéger, solide et multi-usageParfait !Je ne changerai rien.
LUNETTES DE SOLEILMH510QUECHUAProtection 4 et polarisantes.Un modèle qui enveloppe bien les yeux et les protège parfaitement.Je ne changerai rien.
GUÊTRESguêtres trailKALENJIEviter que des petits cailloux ou de la neige ne rentre dans la chaussure.L’élastique qui passait sous la chaussure a rendu l’âme au 7ème jour de marche.Je prendrai une autre marque.
RÉPULSIF À INSECTEDeetSAWYERProtection contre les moustiques.Jamais utilisé.Je ne changerai rien.

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4 commentaires

Sophie 13 novembre 2018 - 10 h 12 min

Superbe récit… je note les infos matos pour ma prochaine rando… 🙂

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Sophie 13 novembre 2018 - 10 h 57 min

Superbe récit !! On s’y Croirait… je ne sais pas quel métier tu fais mais abandonne le pour faire écrivain… j’acheterai Tes récits avec plaisir 😉 bravo

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Sophie 13 novembre 2018 - 22 h 42 min

Merci pour ce beau partage !! Je ne sais pas quel métier tu fais mais tu devrais laisser tomber pour faire écrivain… 😉

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Lucas 17 novembre 2018 - 11 h 50 min

Superbe aventure, magnifiquement bien racontée tant sur le chemin intérieur parcouru que sur ce chemin Américain. Un mine d’or de détails logistiques et pratiques pour ceux qui se posent des questions sur les aventures de ce type ! Bravo Julien !

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