Trekking aux abords du champ de glace sud de la Patagonie : le circuit Huemul

par Expérience Outdoor
Un peu de neige, rien de bien méchant jusque là

Un groupe d’ami nous partage leur expérience Circuit Huemul. Un trekking de 5 jours dans le but d’observer le champ de glace sud de la Patagonie lors de leur traversée de l’Amérique du Sud à vélo.

Un glacier, des icebergs sur un lac, des couleurs automnales et des monts enneigés, difficile de louper la photo ! durant notre trek sur le circuit Huemul
Un glacier, des icebergs sur un lac, des couleurs automnales et des monts enneigés, difficile de louper la photo !

Information sur notre trekking sur le circuit Huemul

Date :

Du 28 avril au 2 Mai 2018

Lieu :

Argentine, Patagonie, El Chaltén

Participants au circuit Huemul :

  • Greg F. (Nouvelle Zélande)
  • Clément T. (France)
  • Aurélien T. (France)
  • Ananth S.R. (Inde)

Deux frères (Clément et Aurélien) partis de Bogotá (Colombie) pour rejoindre Punta Arenas (Argentine) à vélo. Ananth nous a rejoint à Santiago (Chili) pour nous accompagner sur les routes de la Patagonie et on a récupéré Greg parce que plus on est de fous plus on s’amuse ! Nos passions communes : la nature, les grands espaces et le goût pour l’aventure. Une équipe de choc et multiculturelle. Langues parlées : l’anglais, l’espagnol, le français et l’hindi, autant dire que les neurones chauffaient par moments.

Où dormir lors du circuit Huemul :

Casa Azul, calle Leonel Terray, à El Chaltén.

Maison avec dortoirs intérieurs ou dans un container réaménagé en mode Camping. Très économique (100$ la semaine ou 70$ en camping en basse saison). Confort simple mais efficace. En basse saison il n’y avait personne donc pas de problème de surpopulation (ce qui est le cas en haute saison à El Chaltén). Pas besoin de réserver (sauf groupe)

Autres logements en argentine :

Beaucoup de logements similaires disponibles dans le village, il y en a pour tous les goûts et conforts. Attention toutefois, à partir de mi mai une bonne partie des hébergements ferment pour l’hiver.

Pendant le trek nous avons dormi en tente, dans les campings mis à disposition gratuitement par l’administration du Parc National Los Glaciares. Tous les campings des randonnées à proximité d’El Chaltén sont également gratuits.

  • 1ère et 2ème nuit : Camp Toro
  • 3ème nuit : Camp Paso del Viento
  • 4ème nuit : Camp Bahia

Où se restaurer / Où se réapprovisionner en Argentine :

Plusieurs supérettes à El Chaltén dont un magasin de vrac (Rua Commandante Arrua), idéal pour la randonnée. Pas un grand choix de produits et les prix sont élevés mais on y trouve de quoi préparer une randonnée.

On vous conseille la boulangerie La Nana (calle San Martin) pour les pâtisseries post-trek.

Quelques conseils pour bien s’alimenter en trek en argentine :

Office de tourisme :

El Chalten ou bien la maison des Guardaparques, située à la sortie de la ville.

Caractéristiques du trek Huemul :

75kms à parcourir et 2 cols à franchir. Boucle réalisée en 4 à 6 jours

Terrain montagneux difficile. Conditions météorologiques très variables typiques de la montagne et de la Patagonie. Vent, neige, pluie, il faut être prêt à tout, surtout à faire demi-tour en cas de doute. Attention aussi pour cette randonnée, il faut impérativement s’équiper d’un baudrier, de mousquetons (pour le franchissement de rivières) et de la carte TOPO.

Dans les environs :

C’est la zone des fameux Monts Fitzroy et Torre donc beaucoup de trekkings sont à faire. Il y a de tout, pour tous les niveaux. Les circuits sont très bien gérés et toute la zone est gratuite (camping et accès). Le paradis du randonneur… et des grimpeurs avec des parois de granite mythiques pour ceux qui osent s’y frotter !

Autres activités proposées: rafting, pêche, mountain bike, kayak.

Bibliographie :

Lonely Planet Argentina

Carte Topo 1/50 000 disponible auprès de l’office de tourisme

Lien internet :

Le circuit Huemul : l’ultime trek de Patagonie

« Circuit Huemul » sur Google ! De nombreux blogs en parlent

Notre trek de 5 jours sur le circuit Huemul

… On a perdu les traces du slovène fou. Tant pis, il ne reste que quelques dizaines de mètres avant le col. La neige est idéale et les conditions incroyables jusque là. On transpire à grosses gouttes sous nos coupe-vents alors que la brise est glaciale. Je suis derrière et peux entendre mes compagnons lancer des hurlements de joie lorsque la pente se termine. J’arrive à mon tour au point le plus haut. Le paysage est à couper le souffle. Un de ceux qui laissent une empreinte profonde dans les mémoires des amoureux de la nature ; et de n’importe qui d’autre d’ailleurs. Pas d’arête mais une sorte de plateau fait office de col. Tout est blanc. Immense. Majestueux. Silencieux. Et pourtant, c’était loin d’être gagné. Loin d’être fini aussi….

L’hiver, déjà ?

Voilà une dizaine de jours que l’on était installé à la Casa Azul (Maison Bleue) à El Chaltén en Patagonie Argentine à attendre la fenêtre météo pour pouvoir faire le Circuit Huemul. Un circuit de trekking peu connu des randonneurs et qui offre pourtant des paysages splendides dont celui du champ de glace sud de la Patagonie via le Paso del Viento. La ville, ou plutôt le village, est connue pour ses sommets mythiques et ses parois de granite, de renommée internationale chez les grimpeurs.

Le Mont Fitzroy (ou Mont El Chaltén, culminant à 3405m) qui donne son nom au massif Fitzroy surplombe un décor de carte postale, qui a même inspiré une célèbre marque de vêtements outdoor pour la création de son logo. Il est secondé par le Cerro Torre (3102m), un pic de granite défiant les lois de la gravité. Mais ça, c’est quand les nuages ne les obstruent pas, ce qui est le cas une bonne partie du temps. D’ailleurs on n’a vu le sommet du Mont Fitzroy qu’une seule fois, et c’était près du Lago del Desierto, à 40 kilomètres.

Les quatre saisons

L’hiver est arrivé plus tôt qu’à l’accoutumé cette année en Patagonie. Enfin, peut-on vraiment parler de régularité climatique dans une région connue pour avoir quatre saisons en une seule journée ? L’eau gèle la nuit dans les gourdes, le vent souffle à décorner un huemul le matin, une pluie glaciale trempe jusqu’aux os pour le déjeuner tandis que l’après midi le soleil fait enlever toutes les couches frénétiquement empilées cinq minutes plus tôt. Autant dire qu’avec un climat pareil, il vaut mieux être prêt à tout ; souvent à rien quand les nuages ont décidé de s’installer pendant des jours, grignotant inlassablement le moral jusqu’à ce qu’une éclaircie vienne gommer la frustration de n’avoir rien pu observer pendant des jours. La Patagonie, terre de tous les extrêmes, terre de patience, où le temps est ce que l’on a de plus précieux, a du caractère.

Une équipe multiculturelle

D’ailleurs, c’était l’objectif de notre traversée de l’Amérique du Sud à vélo à mon frère et moi, rejoindre la Patagonie. Elle nous fascine et nous attire depuis Bogota, capitale de la Colombie et notre point de départ. Les récits d’autres voyageurs rencontrés sur notre chemin, de livres lus sous la tente et de documentaires visionnés n’ont fait que grandir en nous ce besoin d’aller goûter à cette région mythique. Ananth, rencontré lors d’une randonnée en Nouvelle Zélande, partage la route avec nous depuis Santiago du Chili.

Citadin indien tombé amoureux de la montagne, son terrain de jeu favori est l’Himalaya où il rêve d’y gravir les plus hauts sommets. Spirituel et calme en toute circonstance, il est le compagnon idéal d’aventure. Notre quatrième acolyte, Greg, connait bien l’instabilité météorologique et la montagne puisqu’il est néo zélandais, où il exerce le métier de guide de moyenne montagne. Nous l’avons rencontré quelques temps plus tôt alors qu’il sortait d’une randonnée sur laquelle nous avions du faire demi-tour. Il avait été surpris par un demi mètre de neige fraîche tombée dans la nuit alors qu’il lui restait encore deux jours de marche pour atteindre la civilisation. Sa jovialité et son positivisme sont ses guides et dans un groupe, son humour transforme instantanément des moments pénibles en situations comiques. Une équipe était formée. Langue commune : l’anglais.

Patience

Voilà dix jours que nous sommes arrivés à El Chaltén et la météo ne nous a pas épargné. À dire vrai, on aurait pu croire que l’hiver s’était déjà installé il y a quelques semaines de cela et une randonnée où la neige nous avait barré la route. On était début avril, et d’après les locaux, une telle quantité de neige à cette période n’avait pas été observée depuis quelques décennies. À vélo, les gants et trois couches de vêtements ne voyaient jamais les sacoches. Mais nous disposons d’un avantage précieux : le temps. Alors en attendant une accalmie, qui rend ces journées d’hiver magiques en Patagonie, on a rongé notre frein.

Dans un endroit comme El Chaltén, ce n’est pas déplaisant, loin de là. Le Parque Nacional de los Glaciares dispose de certaines des plus belles randonnées du monde, toutes accessibles depuis le village. On en a grandement profité bien entendu : un jour pour aller voir le Mont Fitzroy (caché derrière les nuages), un autre vers le Cerro Torre (que l’on n’a pas vu), puis on a réessayé de capturer Fitzroy, en passant deux nuits au campement le plus proche, toujours sans succès.

Pendant ce temps, les nouvelles provenant du circuit Huemul n’étaient guère encourageantes. Plusieurs équipes avaient dû faire demi tour, à cause de la neige qui bloquait l’accès au Paso del Viento, point culminant du circuit Huemul et réputé pour ses vents extrêmes. Alors que nous commencions à désespérer, les prévisions météorologiques ont changé. Une fenêtre météo, pas parfaite, s’offrait à nous. Et lorsque nous avons pu voir le sommet du Mont Fitzroy depuis le village nous y avons vu un signe. Mode préparatifs activé. Le départ est prévu pour le lendemain.

Et non, le sommet du Mont Fitzroy reste bien caché derrière les nuages
Et non, le sommet du Mont Fitzroy reste bien caché derrière les nuages

Optimistes

On s’élance sous un ciel cristallin, plein d’espoirs (de folie?). Personne n’a pu faire le circuit Huemul depuis près de deux semaines mais on espère que le soleil aura fait fondre suffisamment de neige pour nous laisser passer. La première journée qui nous emmène à 1000m d’altitude sera décisive. On enlève rapidement les couches sur la première montée, pas raide, mais longue. Il n’y a pas un brin d’air. Le mont Fitzroy nous offre son plus beau visage. Mais ce n’est pas dans sa direction que nous nous dirigeons cette fois-ci.

Le Mont Fitzroy nous nargue. Voilà dix jours que nous essayions de le voir ! pendant notre trek sur le circuit Huemul
Le Mont Fitzroy nous nargue. Voilà dix jours que nous essayions de le voir !

La vallée Tunel

Le sentier est facile à suivre jusqu’à ce que la neige se fasse de plus en plus présente pour finir par recouvrir entièrement le terrain. Et lorsqu’elle a fondu, c’est de la boue qui la remplace. Heureusement il n’y en a pas assez pour nous bloquer le passage et les premières vues sur le Lago Viedma (un des plus grands lacs de Patagonie) et sur la vallée de la rivière Tunel, où se trouve notre premier camp, sont saisissantes. Le Paso del Viento, ou la porte d’entrée vers le champ de glace sud de la Patagonie, est visible lui aussi. Il y a beaucoup de neige… On ne s’attarde pas car même s’il fait beau, le froid est saisissant et les journées sont courtes en cette période.

La vallée fait un peu office de cuvette et est très humide, presque marécageuse par endroits. Difficile de garder les pieds secs. Après 16kms de parcourus, on atteint le Camp Toro, où les randonneurs ont érigé des balustrades de bois pour se protéger du vent. Pas de vent ce soir. Pas grand monde au camp non plus, seul un autre randonneur slovène installe sa tente à proximité. Nous ne verrons personne d’autre de tout le circuit Huemul. Le froid n’a pas l’air de trop le déranger malgré un équipement encore plus léger que le nôtre. Une première journée sans encombres qui nous remplit d’optimisme. La nuit va vite nous faire changer d’avis.

Un peu de neige, rien de bien méchant jusque là pendant notre trek sur le circuit Huemul
Un peu de neige, rien de bien méchant jusque là
Les vues sur la vallée Tunel sont impressionnantes. Le Paso del Viento est en haut à gauche durant notre trek sur le circuit Huemul
Les vues sur la vallée Tunel sont impressionnantes. Le Paso del Viento est en haut à gauche

Vent, neige et rongeurs affamés : Camp Toro

Avant d’aller se coucher nous avons pris la précaution de suspendre toute notre nourriture sur des branches. C’était peine perdue. Nous avons fait l’erreur de manger près des tentes et en cette période, les rongeurs, d’habitude rassasiés par les nombreux randonneurs de la haute saison, sont affamés. Tout y passe : nos tentes, lacets, gourdes, papier toilette, sac à dos et dentifrice sont grignotés. Difficile de dormir avec les souris qui entrent sans cesse dans la tente en quête de miettes que nous aurions pu oublier. Une d’elles, certainement remplie d’espoir, a même l’idée de croquer à pleines dents dans mon matelas auto gonflant. Souris 1 – Trekkeurs 0.  De peur de se faire oublier, le vent se lève et c’est un piquet de tente qui lâche et déchire la toile.

Deuxième jour du trekking Huemul

Après une nuit médiocre, le vent souffle de toute sa puissance. Le bruit est impressionnant et lorsque nous tentons de nous aventurer en dehors du camp, dans la vallée, nous tenons à peine debout ! Obligés de s’arc bouter pour progresser, nous réalisons rapidement que c’est peine perdue. La température ne dépasse guère les 0°C et le facteur vent renforce la sensation de froid. Or, le Paso del Viento est situé à près de 900m au dessus de nous. La décision de repousser à demain la montée au col est prise à l’unanimité. Les conditions n’ont pas l’air d’affecter le slovène qui part du camp un peu avant midi.

Il n’a pas suffisamment de nourriture pour attendre une journée. On ne le reverra plus mais ses traces nous seront bien utiles. L’après-midi, on part repérer la traversée d’une rivière que l’on devra faire suspendus à un câble. Rien de bien compliqué mais cela nous semble plus dangereux que de traverser à pied… La soirée est consacrée à la réparation des dégâts causés par les souris et surtout à déplacer notre campement, recouvrir de feuilles mortes les ouvertures de la tente pour empêcher les rongeurs de rentrer mais aussi pour mieux conserver la chaleur. La nuit sera bien plus calme que la précédente !

Paso del Viento

Pas de bruit, pas un souffle d’air, la montagne se montre sous son plus beau jour lorsque nous nous mettons en route le troisième jour. Nous passons rapidement le Lago Toro et traversons sans encombre la rivière Tunel à l’aide de nos baudriers. À mesure que nous prenons de la hauteur, les vues se dégagent et se font de plus en plus belles. On passe aussi du côté du soleil, ce qui n’est pas déplaisant car à l’ombre tout est gelé !

Plus vraiment de sentier désormais mais il faut suivre les cairns (tas de pierres) qui nous indiquent le chemin. Sur la moraine du glacier Tunel, le terrain est moins stable et les chutes de pierres se font entendre. On grimpe doucement mais sûrement avec le Paso del Viento toujours en ligne de mire. Avant d’atteindre la neige, on profite d’une pause snack pour s’imprégner du décor. Le temps est incroyable et inespéré par rapport aux jours précédents. Comme si le temps était suspendu juste pour nous laisser passer.

Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel Les vues sur la vallée Tunel sont impressionnantes pendant notre trek sur le circuit Huemul
Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel Les vues sur la vallée Tunel sont impressionnantes
Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel lors de notre trek sur le circuit Huemul
Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel Prudence et admiration sur la moraine du glacier Tunel

Récompense

La neige est idéale et accroche bien sous les chaussures. nous marchons dans les traces du slovène qui sont bien espacées, il a dû allonger le pas ! Le souffle est court et les visages concentrés à mesure que la pente se raidit. La neige ne nous arrive guère qu’aux tibias et malgré un ou deux passages un peu plus glissants, c’est sans problème que nous arrivons au Paso del Viento.

La pente se raidit vers le Paso del Viento lors de notre trek sur le circuit Huemul
La pente se raidit vers le Paso del Viento
Derniers mètres avant le Paso del Viento durant notre trek sur le circuit Huemul
Derniers mètres avant le Paso del Viento

Le paysage là haut est époustouflant. Il n’y a d’ailleurs pas un seul brin d’air. Des conditions assez exceptionnelles étant donné le nom du col ! Nous ne pouvons nous empêcher de hurler de joie. Tout est blanc, immaculé, grandiose, vierge… Il n’y a pas assez d’adjectifs pour décrire ce que l’on voit, ce que l’on ressent. Le champ de glace sud de la Patagonie s’offre à nous, avec le glacier Viedma qui semble s’écouler tranquillement, immense. Même si nous savons que beaucoup de personnes sont passées avant nous, la solitude des lieux nous donne ce sentiment que doivent avoir tous les grands explorateurs lorsqu’ils posent leur yeux sur des paysages encore jamais vus. Le sentiment de satisfaction d’être arrivés jusqu’ici est vite remplacé par cette humilité que nous transmet la Nature face à sa grandeur. On se sent si petits !

Sur le Paso del Viento avec le champ de glace sud à l
Sur le Paso del Viento avec le champ de glace sud à l’horizon
On prend la pause, difficile de ne pas être tenté avec un tel paysage ! Seul Ananth craquera pour un selfie :) lors de notre trek sur le circuit Huemul
On prend la pause, difficile de ne pas être tenté avec un tel paysage ! Seul Ananth craquera pour un selfie 🙂

Bonne étoile

Nous prenons le temps de profiter mais il faut penser à redescendre. Après une montée si parfaite, nous avons certainement perdu de notre concentration et je commets une erreur qui aurait pu être fatale. Du côté du champ de glace, le soleil ne passe que quelques heures par jour et la neige n’a pas du tout le même aspect. Tout y est gelé. Si bien que la descente s’avère beaucoup plus compliquée. Sur une pente neigeuse où nous sommes forcés de creuser des pas, mon pied dérape et je me vois glisser. Prenant rapidement de la vitesse, mon cerveau passe alors en mode survie.

C’est d’ailleurs assez prodigieux comment le processus de pensée s’accélère à ce moment-là. La pente sur laquelle je suis n’est pas très abrupte, mais celle qui suit me glace le sang. Il faut que je m’arrête. Maintenant. Je tente désespérément de m’accrocher à la neige et d’y planter mes talons. Nous ne pensions pas avoir besoin de crampons ni de piolets. Quelle erreur. Heureusement je dois avoir une bonne étoile car quelques mètres avant un rocher et une inclinaison plus abrupte de la pente, je sens mes talons qui s’enfoncent dans la neige et stoppent ma chute. Ouf. Je reste environ une minute, les mains encore tremblantes sous le choc, assis là. Lorsque je me retourne pour rassurer mes compagnons, ils me regardent ahuris. J’ai eu chaud ! Ils prendront leur temps pour parcourir la cinquantaine de mètres que j’ai glissé.

Le camp Paso del Viento

sans crampon ni piolet, c
Sans crampon ni piolet, c’est sur les fesses que nous descendrons ce névé

Tandis que nous tachons d’éviter les névés gelés trop pentus ou de prendre notre temps sur ceux que nous ne pouvons éviter, mes pensées se bousculent. Ce sont surtout celles de s’en être sorti totalement indemne qui dominent. Quelle chance incroyable.

Le terrain s
Le terrain s’aplatit avant de rejoindre le Camp Paso del Viento

Le terrain s’aplatit avant de rejoindre le Camp Paso del Viento

Nous atteignons deux heures plus tard la sécurité du camp du Paso del Viento situé près d’un petit lac partiellement gelé, pour y passer la nuit la plus froide du parcours. Notre dîner à peine avalé et la nuit tombée, tout gèle. Le thermomètre tombe à -7°C lorsque nous nous réfugions dans nos duvets et empilons toutes les couches de vêtements disponibles. Hauts les cœurs, la peine d’une nuit froide vaut bien la journée que nous venons de vivre ! Seuls les craquements du lac qui gèle viennent interrompre le silence impérial de cette nuit.

Paso Huemul

Au réveil, nous avons des glaçons dans les gourdes et je dois passer mes chaussures au réchaud pour pouvoir les enfiler. Elles sont plus dures que de la pierre ! Nous nous mettons en route et marchons aussi vite que le terrain nous le permet pour nous réchauffer. Tout est gelé autour de nous et on peut entendre le ruissellement de l’eau sous la glace. Nous ne voyons pas le soleil avant midi et ce pendant… 10 minutes ! Sur ce versant de la montagne, il n’arrive pas à dépasser les cimes en cette période de l’année. Finalement, notre progression est beaucoup plus rapide que la veille et nous ne rencontrons pas d’autres névés. Le sentier est facile à suivre et nous continuons d’admirer le glacier Viedma, que nous surplombons. Le temps est au beau fixe.

La montée vers le Paso Huemul est encore plus raide que celle vers le Paso del Viento mais sans neige ni difficulté technique. En haut, nous jetons un dernier regard au champ de glace pour redescendre vers le Lac Viedma, déjà aperçu lors de notre première journée. La descente est abrupte (700m de dénivelé négatif en 1,5 kilomètre) et rendue glissante par la neige fondue. Mais le soleil chauffe à nouveau de ce côté-ci et les prises sont multiples lorsque nous retrouvons la flore.

Dernier coup d
Dernier coup d’oeil sur le champ de glace sud de Patagonie depuis le Paso Huemul

Camp Bahia

Au fur et à mesure de notre descente, le thermomètre remonte et le soulagement d’avoir passé les plus grandes difficultés aussi. Le lac Viedma s’offre à nous à perte de vue et quelques icebergs flottent de ci de là. C’est la baie Bahia qui attire le plus nos regards, nous manquant de nous faire trébucher parfois. En contrebas, le glacier Viedma a vomi d’immenses glaçons qui sont venus s’agglomérer dans cette baie à l’allure irréelle.

On peut les entendre s’entrechoquer de très haut sur la montagne. Arrivés sur le plancher des vaches (littéralement), c’est une course pour rester au soleil qui s’engage, l’ombre grignotant rapidement du terrain. Nous ne verrons finalement le soleil disparaître derrière les montagnes qu’une fois le campement établi. Nous profitons même de ses derniers rayons pour « bronzer » et prendre l’apéritif en « terrasse ». Il faut dire qu’il fait près de 3°C, une température presque estivale en cette saison ! Un pur moment de bonheur.

La baie Bahia et le lac Viedma. Notre camp est sur la presqu
La baie Bahia et le lac Viedma. Notre camp est sur la presqu’île entre les deux baies
La tente d
La tente d’Ananth. Promis il ne l’avait pas mise juste pour la photo !

Dernier jour du trek Huemul

Dans nos têtes nous avons fini de randonner, maintenant que les principales difficultés sont passées. En pratique, il nous reste 23 kilomètres à parcourir. Heureusement le soleil est toujours de la partie et c’est l’esprit léger que nous parcourons ces derniers kilomètres à travers la pampa patagonienne. Les sacs sont presque vides et nous réprimons l’envie de courir dans ces herbes hautes qui s’y prêtent si bien (Voir la Petite Maison dans la Prairie). Chacun est dans ses pensées le matin, ou bien écoute de la musique, ressassant ce que l’on vient de vivre et profitant de ce sentiment grisant d’être allé jusqu’au bout. On ne peut pas nier la chance que l’on a eu tout du long. Je suis content de revenir intact et remercie ma bonne étoile.

Un glacier, des icebergs sur un lac, des couleurs automnales et des monts enneigés, difficile de louper la photo ! durant notre trek sur le circuit Huemul
Un glacier, des icebergs sur un lac, des couleurs automnales et des monts enneigés, difficile de louper la photo !

Lac Viedma

On traverse une dernière rivière, sans utiliser les baudriers cette fois. Elle n’est pas large heureusement car l’eau est si froide qu’elle nous brûle les pieds et nous donne des crampes. Nous déjeunons près de l’embarcadère d’une vedette de tourisme aux bords du lac Viedma. Personne. Les vaches d’une hacienda nous regardent d’un drôle d’œil lorsque nous traversons leur champ.

Alors on s’improvise gauchos et ce sont des centaines de ruminants qui s’enfuient à notre approche. Moment assez unique. De la boue, de la bouse, de la boue, de la bouse… un sentier … une route ! Celle qui mène à El Chaltén. Toujours bizarre cette sensation de revenir à la civilisation après plusieurs jours passés en montagne. Toutefois, la transition est douce, le village est bien tranquille et certains établissements ont déjà fermé. L’hiver se prépare ici. Nous regagnons le confort, une douche, un bon repas chaud, une bière, la vie est simple.

Outro

Nous ne retrouverons pas le slovène et ne saurons jamais comment il a parcouru une telle distance en si peu de temps et avec un vent pareil. Ou comment il a fait pour traverser les névés gelés, là où nous glissions, nous pouvions voir des traces de pas (les siennes?), mais pas de marches taillées. On restera encore une journée pour se reposer à El Chaltén avant de reprendre la route sur nos vélos, tous les quatre. Le temps est encore incroyable lorsque nous partons, laissant apparaître tout le massif du Fitzroy. C’est une partie de nous que nous laissons à El Chaltén. Nous reviendrons, c’est promis !

À bientôt Fitzroy ! durant notre trek sur le circuit Huemul
À bientôt Fitzroy !

Matériel utilisé sur le circuit Huemul

Équipement utilisé par Aurélien circuit Huemul

CATÉGORIENOM DU MODÈLEMARQUEPOURQUOI AVOIR FAIT LE CHOIX DE CE MODÈLE AU DÉPARTEST-CE QUE CE CHOIX A RÉPONDU À CE CIRCUIT HUEMULSI C’ÉTAIT À REFAIRE
TENTEAero 2PINGUINPour sa polyvalence, son prix, pas besoin des sardines pour qu’elle tienne deboutOui. Mais fragile sur le long termeNon.
MATELASRidgerestTHERMARESTPour son indestructibilité, sa polyvalence, son prix, la garantie constructeurOui. Si l’on est prêt à céder du confortOui. Mais un peu limite en dessous de 0°C
DUVETForclaz 5°CDECATHLONSa polyvalence et son prixNoooon. Trop froid !Non. Fragile sur la durée
RÉCHAUDWhisperliteMSRSa polyvalence, son indestructibilité, le SAV MSROui. Réchaud parfait si nettoyé régulièrement !Oui
LAMPE FRONTALEOnnight 410DECATHLONSon prix, les lumens, la batterie (pas de déchets produits !)OuiOui
COUPE VENT/PLUIETorrentshellPATAGONIAPour son imperméabilité, sa qualité, l’engagement écologique de la marqueOui.Oui
POLAIREForclaz 500DECATHLONSon prixNon. Pas assez chaud et fragile sur le long terme. Au prix où elle était, je ne pouvais pas m’attendre à mieuxNon
CHAUSSURESXA PRO 3DSALOMONSa polyvalence, sa légèreté, sa durabilitéOui. Idéale pour les terrains montagneuxOui

Équipement utilisé par Clément lors du circuit Huemul

CATÉGORIENOM DU MODÈLEMARQUEPOURQUOI AVOIR FAIT LE CHOIX DE CE MODÈLE AU DÉPARTEST-CE QUE CE CHOIX A RÉPONDU À CE CIRCUIT HUEMULSI C’ÉTAIT À REFAIRE
MATELASTrail ScoutTHERMARESTSon prix, sa polyvalence, la garantie ThermarestOui. Mais trop volumineux et lourd.Non. Je passerais à la gamme supérieure
THERMIQUESCapilenePATAGONIALa qualité et l’engagement écologique de la maqueOuiOui
POLAIREIceland jktMILLETLégèreté, chaleur et discretionOuiOui
SOFTSHELLWindwarm 500DECATHLONSon prix, sa chaleurOui, idéale pour les temps secs et froidsNon. Je prendrais une doudoune, plus légère et moins volumineuse
CHAUSSURESMOAB GTXMERRELLTaille basse, légèreté, solidité. Pour leur polyvalenceOui. Elles n’ont pas résisté aux terrains patagoniens malheureusementNon. Je prendrais des chaussures de trail robustes (XA PRO 3D de Salomon)
CAMÉRAD3100NIKONSimplicité, idéal pour apprendre la photoOui. Même si avec les 2 objectifs et accessoires, c’est un peu lourd et encombrantOui mille fois ! Rien de tel que de belles photos

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3 commentaires

alice tabourin 8 novembre 2018 - 19 h 05 min

Super article! Je crois que pour vous, c’était parfait de le faire à cette saison ; ça rend l’expérience unique et extrême. Je vous remercie du petit tableau sur l’équipement, j’ai pris quelques notes. A bientôt en Patagonie (?).

Répondre
Javier Pérez Carrió 8 novembre 2018 - 19 h 54 min

Que de belles aventures de mes amis en Patagonie! J’aimerais bien y aller un jour!

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Javier Pérez Carrió 8 novembre 2018 - 19 h 57 min

Que de belles aventures de mes amis en Patagonie! J’aimerais bien y aller une fois avec Alice!

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